jeudi 5 avril 2012


John Carter
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Sur les bons conseils de l’ami Conrad, The Renaissance Man, je suis allé voir John Carter. Enfin, les bons conseils… Pour être parfaitement honnête, j’ai monnayé ma présence à cet événement culturel. Comme tout le monde, j’avais vu la bande annonce, ses Jar-Jar Binks verts à quatre bras, ses vaisseaux spatiaux en forme de libellule, et son intrigue faite du plus fin parchemin martien. De plus, les nouvelles du pays natal étaient mauvaises : Disney collait dans ces comptes 150M$ de pertes, et l’imputaient à ce pauvre John. C’est salaud, mais c’est comme ça, la compta…

Ma motivation, si jamais il y en eu une, était désormais à zéro. Mais le Professore est vénal, et acceptait donc de se faire sponsoriser. Ma place serait remboursée si jamais le chef d’œuvre n’était pas au rendez-vous. En professionnel des loisirs et du jeu d’argent, je savais que ce pari était très probablement gagnant, la cote du pauvre Conrad s’étiolait de jour en jour, et moi j’allais ajouter un film à ma liste qualificative du Topten.

Gratos.

Conrad cassait son PEL, en vue de payer les 12 euros 90 du Gaumont Parnasse, plus la somme modique de 1 euro pour m’offrir des lunettes 3D. Encore un indice de cote à la baisse, car comme chacun sait 3D=caca.

Bon, bref, me voilà donc mal installé, lunettes sur les yeux, avec une mangeuse bruyante de pop corn à côté, et une hideuse bande annonce de Titanic 3D en apéritif.

Et le film commence.

Mal.

Une scène de bagarre sur une Libellule de Combat où on ne voit rien, because la 3D + confusion cinégénique. Et les rigolades ne tardent pas à fuser :

– « Les Therns de Barsoom attaquent la cité d’Hélium, Grand Jeddak ! »

Sans déconner.

Mais hop, un petit flash-back western. 1881, le jeune Burroughs (allusion à l’auteur d’Une Princesse de Mars), touche un héritage. Des millions de dollars, et un livre, les souvenirs de son oncle, John Carter.

Hu,Uh…

C’est là que commence John Carter, le grand film d’aventure d’Andrew Stanton. Et il ne va pas vous lâcher. Car à ma grande surprise, John Carter va nous scotcher jusqu’à la fin, sans pour autant se départir de son esthétique pulp.

C’est quoi, le pulp ? Un papier, de mauvaise qualité, destiné à l’impression de romans de gare publiés dans les années 20-30. C’est là que va naître la science-fiction, les Astounding Stories et autre Weird Science. Les premiers écrivains pulp mêlent science-fiction, princesses déshabillées à forte poitrine, héros musculeux sabre à la main, et anciennes civilisations extraterrestres. Flash Gordon, John Carter, Conan le Barbare, naissent à ce moment-là. Et satisfont une clientèle mâle en peine d’exotisme et d’érotisme. Edgar Rice Burroughs, avant Tarzan, une version édulcorée de l’homme en slip panthère, crée le cycle de Barsoom, les aventures de John Carter.

Le génie d’Andrew Stanton, c’est de payer sa dette à cet univers-là, comme il en rêvait parait-il, depuis de nombreuses année… C’est ensuite d’en faire une tragi-comédie, tout en respectant les canons du genre. Pendant 2h, il ne lâchera rien : les costumes ringards, les épées en plastique, la princesse un peu trop plantureuse, et l’acteur principal qui s’appelle Kitsch. Il y a même le chien, martien, à huit pattes, qui s’appelle Woola. C’est ce qui s’appelle une course à handicap.

Mais pourtant, Stanton va créer un personnage, John Carter, rebelle sans cause, soldat perdu qui a déjà tout perdu, et n’a aucune raison de prendre parti dans cette guerre des Bleus et des Rouges. Il va nous attendrir sur le sort de Dejah Thoris (la bombasse qui a abusé des cheeseburgers martiens), et qui ne veut pas se marier avec son ennemi Sab Than. Même si cela amène la paix, car elle est convaincue que cela déclenchera la guerre. Il va même nous émouvoir sur une relation père fille entre Thrak, les fameux Jarjarbinks martiens dont nous nous gaussions au début de cette chronique. Et il va, enfin, magnifiquement réussir à retomber sur ses pieds dans le final. Comme chacun sait, ce qui compte, c’est souvent la conclusion.

Voilà donc un OVNI ; un film de SF à gros budget qui n’espère pas vendre de peluches ou de Happy Meal, une ode au pulp matinée de réflexions philosophico-écologistes, un casting au rabais, mais avec de vrais personnages, un univers improbable mais des dialogues fins et drôles…

Au final, un incident industriel qui n’aura pas trouvé sa cible. Les fans de Burroughs sont peu nombreux (et n’y sont pas allés), les autres ont trouvé la GCA un peu fort de café.

Dommage, nous ne retournerons donc pas de sitôt sur… Barsoom !


3 commentaires à “John Carter”

  1. CineFast » Topten 2012 écrit :

    […] in Distress 5 Looper 6 Cogan Killing them softly 7 Les Adieux à la Reine 8 Battleship 9 John Carter 10 Moonrise […]

  2. 自动给料设备进口报关 écrit :

    4、 00%长江投资16.国家统计局公布了5月份消费、投资等数据。江苏人),接到报案后,仅有2%的企业雇员超过1000人。大约四分之一的工程机械产品因新产品或产品显著改进带来了营业额的提升。2亿元, 数据显示,下降3.降低对外依存度;加快发展原木深加工。

  3. CineFast » Star Wars VII – Le Réveil de la Force écrit :

    […] Nous avons expliqué à longueur de colonnes ici d’où vient cette condescendance, d’où vient ce mépris. Pas de snobisme, mais l’horrible sentiment que notre littérature chérie (Brunner, Bradbury, Brown, Dick, Delany, Haldeman, Lem, Herbert, Lovecraft, Moorcock, Pohl, Sheckley, Simak, Sprague De Camp, Strougaski, Zelazny…) avait disparu dans un trou spatio-temporel créée par le succès gargantuesque de l’opérette en pyjama de Mr Lucas. Star Wars, en ressuscitant un genre défunt et méprisé des amateurs, était devenu LA science-fiction pour le grand public. Non seulement Lucas avait piqué dans les fonds de tiroirs du genre (Buck Rogers et les serial des années 30), non seulement il avait volé les idées des plus grands (Dune, pour ne pas le nommer, mais aussi La Forteresse Cachée de Kurosawa, Metropolis, et Le Magicien d’Oz, ou The Dam Busters pour les scènes finales*), mais en plus, il le faisait mal. Car Star Wars n’a eu aucune descendance : le space opera n’a pas fleuri comme genre cinématographique, et il a fallu attendre près de quarante ans pour qu’éclose une nouvelle tentative (beaucoup mieux réussie, John Carter) […]

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