Dès les premières minutes de Key Largo, on sait qu’on est dans la production hollywoodienne, qualité Triple A. Noir et blanc marmoréen, couple mythique Bogart/Bacall, John Huston et la Warner. La Warner, peut-être le seul studio hollywoodien qui ait tenu une forme de ligne éditoriale tout au long de sa longue existence (99 ans au compteur) : des films méchants, mauvais esprit, immoraux, de William Wellman aux sœurs Wachowski en passant par Kubrick…
Key Largo, c’est la ville au début des Keys, cet archipel magnifique au sud de la Floride relié malheureusement par une horrible highway lardée de supermarchés. Il faut chercher la beauté derrière l’anarchie immobilière, ou revoir Bloodline. Mais là, on est en 1948, les Keys sont encore sauvages, et c’est l’hiver, l’ouragan gronde. Bogart débarque dans un hôtel ; il est venu dire au propriétaire quel héros son fils était pendant la guerre. Mais traine dans l’hôtel une bande patibulaire, en fait le gang d’un mafieux revenu en Floride, le terrible Johnny Rocco (Edward G. Robinson) qui va rapidement prendre tout le monde en otage.
Première audace, le bad guy n’apparait qu’au bout d’une demi-heure. Ce qui laisse le huis clos s’installer, les personnages (ambigus) se découvrir, et la tension monter jusqu’à l’explosion finale. En 1h40, Huston extrait l’essence même du film noir : des conflits moraux (qu’est-ce que le courage ?), le désespoir moral de l’après-guerre qui voit les profiteurs revenir sur le devant de la scène, et bien sûr, l’amour impossible. Voir Bacall qui regarde Bogart (ils sont en couple depuis quatre ans) suffit à donner des frissons dans le dos…
posté par Professor Ludovico
Ah c’est ça une bonne idée de faire une rétrospective Veronica Lake. Constance Frances Marie Ockelman va exploser dans les années 40, en quelques films : Les Voyages de Sullivan, Tueur à gages, La Clé de verre, Ma Femme est une Sorcière, Le Dahlia Bleu…
Mystérieusement belle, intelligente, pointue, Veronica Lake enchaine les rôles de femme fatale mais tombe vite dans l’oubli. Peu importe, son visage étrange, sa mèche blonde qui cache son œil droit, lui donne pour toujours de l’avance sur ses voisines de plateau, qui s’évertuent à jouer les nunuches, decent american women. Lake imprime la pellicule et nos souvenirs pour toujours.
On commence donc par Tueur à gages, pas le meilleur tirage. Une histoire bourrée de rebondissements abracadabrantesques, qui tient surtout par l’actrice et le couple maudit qu’elle forme avec le tueur à gages du film, le débutant Alan Ladd avec qui elle va faire d’autres films, avec de vrai scenarios : La Clé de verre, et Le Dahlia Bleu
Beaucoup mieux, on y reviendra…
Rétrospective Veronica Lake
OCS
lundi 21 février 2022
River of Grass
posté par Professor Ludovico
River of Grass est un peu l’équivalent, pour Kelly Reichardt, du Peur et Désir de Kubrick. C’est-à-dire un film de débutant, un peu raté, avec plein de maladresses, mais qui pose d’emblée les futures thématiques de la cinéaste de Old Joy, Wendy et Lucy, ou First Cow. La figure de style du road movie, de la fuite à deux ; mais aussi l’errance immobile, le poids du lieu qui détermine socialement les personnages, et la volonté de s’en extirper…
River of Grass, c’est aussi le premier et le dernier film de Reichardt en Floride, dans son Dade County natal. Un comté qui a particularité d’abriter une mégalopole urbaine (Miami) et un désert terrifiant (le marais des Everglades).
Il est symptomatique que notre couple maudit, Cozy et Lee, essaient pendant tout le film d’en sortir et n’y arrivent jamais. Kelly Reichardt, elle, s’enfuira au fin fond de l’Oregon, l’opposé absolu de la Floride : un état quasi désertique, pluvieux, progressiste, et qui inspirera ses plus beaux films.
samedi 8 juin 2019
Love, Death and Robots
posté par Professor Ludovico
L’amour à mort avec les robots. Cette petite série
d’animation est à la fois anecdotique et intéressante. Anecdotique car il s’agit
de (très) courts-métrages plus ou moins réussis. Intéressant parce qu’il y a
des perles narrative ou graphique à découvrir…
jeudi 21 mars 2019
De l’Or pour les Braves
posté par Professor Ludovico
Inexplicablement, De l’Or pour les Braves manquait à ma collection des années 70, l’anthologie paternelle des films sur la Seconde Guerre mondiale : des Canons de Navaronne à L’ouragan vient de Navaronne (avec Harrison Ford !), du
Pont de la Rivière Kwai au Pont trop Loin . Pas que des chefs d’œuvre, donc.
Mais celui-ci est très original ; on croit commencer par un film sur Telly Savalas, mais si on lit bien le titre original, on s’aperçoit que ça s’appelle Kelly’s Heroes, que Kelly c’est Clint Eastwood, et que de héros, il n’y en a point. Kelly est un ancien lieutenant dégradé qui réunit une bande de loufiats armés jusqu’aux dents (et jusqu’au Sherman) pour aller libérer, un peu en avance, un petit village de l’est de la France. Enfin, surtout libérer sa banque de 16 millions de dollars en lingots d’or.
Le film de Brian G. Hutton* est un curieux mélange de classique action-movie 60’s avec son cast de dur-à-cuir, mais contient aussi les amorces du mouvement hippie (le film est sorti en 1970), avec une section de Sherman déjantée pilotée par Donald Sutherland qui a l’air de fumer du shit en permanence.
La morale de l’histoire est également très étonnante, mais on vous laissera la découvrir…
* Qui nous donna aussi Quand les Aigles Attaquent
dimanche 30 décembre 2018
La Bûche
posté par Professor Ludovico
On apprécie ici beaucoup Danièle Thompson, son sens de l’intrigue bien menée, des dialogues ciselés et ses personnages bien campés. Il manquait La Bûche à notre répertoire, mais elle a pris un petit coup de vieux.
Ne subsiste que la prestation rigolote de Sabine Azéma en chanteuse russe et le grand Claude Rich. Le fiston (Christopher Thompson) joue déjà comme cochon face à une Charlotte Gainsbourg déjà très douée. Par ailleurs les intrigues amoureuses, les révélations, semblent aujourd’hui très évidentes aux spectateurs habitués.
Mais bon, avec ce film, le système Thompson se mettait en place…
samedi 1 décembre 2018
L’Origine du Christianisme
posté par Professor Ludovico
Plus compliqué, mais tout aussi passionnant, L’Origine du Christianisme poursuivent l’œuvre entamée par Corpus Christi : comment, après la mort de Jésus, le christianisme est né à partir de l’an 50. Un débat, non pas contradictoire, mais en revanche bourré d’incertitudes, dans lequelles Jérôme Prieur et Gérard Mordillat tentent de mettre de l’ordre. Comment Saint-Paul, celui qui ne croyait pas, est devenu le plus grand prosélyte ? Comment une religion, issue de Judée, et dont les principaux prophètes étaient juifs, a accusé les juifs de tous les maux pour mieux convertir les romains ? Comment une religion naissante, en interdisant aux non-juifs du prêcher à Jérusalem, leur a paradoxalement offert l’opportunité de prêcher dans l’ensemble du pourtour méditerranéen ? Comment l’exclusion des premières hérésies, a permis à la religion de se définir ?
Tout cela en dix heures ardues, mais toujours passionnantes.