mardi 8 novembre 2005


Bataille dans le ciel
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Si le cinéma est la dernière dictature du monde civilisé, si la salle de projection est le dernier vrai club masochiste, alors Bataille dans le ciel en est la parfaite incarnation.

Être cinéphile, c’est bien sûr être masochiste. Qui veut s’enfermer, de sa propre volonté, dans un siège inconfortable ? Qui veut rester coincé deux heures dans le noir, sous la férule d’un Maître Dominateur ? Quelle meilleure définition du masochiste que spectateur de cinéma ?

Probablement : acteur de cinéma. Car lui se plie, pendant toute la durée du tournage, aux volontés dictatoriales, mégalomaniaques, libidineuses, manipulatrices du metteur en scène. Les grands malades sont légion, et connus de tous : la rigueur compulsive (Kubrick), l’obsession monomaniaque tendance blonde (Hitchcock), le bourreau d’enfants (Spielberg), le mégalo manipulateur (Coppola).

Bataille dans le ciel réunit les deux : il inflige au spectateur deux heures de beauté glacée, entrecoupée de scènes de cul syndicales façon Houellebecq dernière période. Un scénario minimaliste : Marcos, un pauvre indien mexicain, a enlevé un bébé pour exiger une rançon. (c’est ce qu’on découvre au bout d’une demi heure de plan séquence sur le périphérique de Mexico). Pas de chance, le bébé est mort. Que faire ? Marcos se confesse à la jeune fille, belle et riche, pute à ses heures, à qui il sert de chauffeur. Elle lui conseille de se dénoncer. Pour mieux asseoir sa démonstration, elle le suce. Il le dit à sa femme (complice de l’enlèvement). Elle l’engueule et l’abjure de ne rien dire. Pour mieux asseoir sa démonstration, elle se fait prendre par derrière.

Se dénoncera-t-il ? Le suspens est insoutenable (le film aussi).

Le jeune Reygadas, le petit branleur de cinémathèque qui a commis ce film (je dis branleur au premier degré, of course) a des choses à dire. Il n’a pas d’histoire à raconter. Il n’y a aucune empathie pour les personnages. Ils sont tous moches. On imagine les séances de casting, et le plaisir tordu de Reygadas à demander à la petite beauté de faire un pompier à l’acteur amateur qui joue Marcos.

Mais tout cela n’est qu’un prétexte, comprenez vous ? Il faut dénoncer la fracture sociale du Mexique contemporain, la misère sexuelle, la société. En vrac, se moquer de la police, de l’armée, du drapeau, du football… mais aussi des moches, des gros, des riches des vieux… Que des prises de position courageuses et innovantes !

Pour des raisons inverses, la critique de Télérama mouille sa culotte, celle de Radio Courtoisie aussi.




mardi 8 novembre 2005


Elisabethtown
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Courez voir Elisabethtown. D’abord parce que c’est un film de Cameron Crowe : on aime ou on n’aime pas, mais c’est un cinéaste plutôt doué. Ensuite parce qu’une critique désastreuse lui réserve au mieux 4 semaines d’exploitation ; enfin parce que c’est un très beau film, peut-être le meilleur de l’année (soit on est un européen cynique et on préfère Closer, soit on est un américain optimiste et on préfère Elisabethtown.)

Cameron Crowe est un américain optimiste. Depuis le début, il laboure le même sillon : pour vivre il faut choisir, et donc savoir renoncer. Renoncer au succès et à l’argent, comme Jerry Maguire, si l’on veut avoir quelque principes. Renoncer aux rêves, aux fantasmes, à l’immortalité, pour vivre, tout simplement, comme dans Vanilla Sky.

Elisabethtown est donc un film sur le deuil. Le deuil du père, qui vient de mourir, et que le héros (Orlando Bloom) doit aller chercher sous forme de dépouille mortelle. Le deuil de la réussite : designer à succès chez un fabricant de chaussure (on reconnaît Nike sans peine), le héros se fait lourder pour avoir fait perdre 947 M$ avec son dernier modèle.

Le deuil de la branchitude, puisqu’il faut se coltiner les vrais gens, ou les péquenots (selon le point de vue) du Kentucky. C’est en effet là, dans la famille originelle, que papa a eu la bêtise de mourir.

Il faudra enfin choisir d’aimer, et pas seulement de copiner / baiser avec Kirsten Dunst, une décision pas si facile que ça à prendre.

On le voit, rien que de bien traditionnel au merveilleux pays de la comédie romantique à l’américaine (« choisir d’aimer », « rédemption chez les ploucs », « quelle belle chose que la famille », « zut, papa est mort »).

Le génie de Cameron Crowe n’est pas là. Il assume complètement le genre. Mais son talent est de ne jamais y sombrer. Quand on se moque des ploucs, on se moque gentiment. Quand on exhorte leurs qualités, on n’en fait pas des héros non plus. Orlando Bloom ne finit pas éleveur de chevaux à Louisville, Kentucky.

Courez voir Elisabethtown. C’est un film qui aime les gens (pas comme Bataille dans le ciel*) ; C’est un film qui aime l’Amérique, enfin celle que nous aimons : la route, les petites villes, le blues… Courez voir Elisabethtown. C’est du hamburger, mais du bon.

* Voir plus loin. Télérama a detesté Elisabethtown et encense Bataille dans le ciel. Comme quoi, y’a une logique.




mardi 8 novembre 2005


Les chroniques de Riddick
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Bof bof ! je pensais passer un lundi soir tranquille, sur la lignée de Pitch Black, le petit film sympa de fin de soirée. Bon en fait, c’est une série B pénible, prétexte à des bastons permanentes de monsieur Vin Diesel (producteur, comme de bien entendu), sur un fond mystico-débile assez endormissant. C’est dommage parce qu’il y avait de l’idée dans la déco, les vaisseaux, les planètes, etc.




mardi 8 novembre 2005


The Wire (« Sur écoute »)
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Séries TV ]

Vient de sortir en DVD une des séries les plus excitantes du moment : The Wire « Sur écoute », achetez-la, volez-la, téléchargez-la, mais ne ratez pas ces douze épisodes qui ne passeront de toute façon pas à la télé. Après les avoir diffusé le dimanche soir à 0h30, Canal Jimmy a en effet constaté que la série « n’avait pas trouvé son public » (sic).

Le Pitch
A Baltimore, aujourd’hui. La libération d’un jeune noir accusé de meurtre (mais libéré par la peur d’un témoin qui inverse son témoignage) rend fou de rage un juge qui secoue le cocotier et demande à ce qu’une équipe de flics soit mise sur pied pour faire tomber ce truand. Cette équipe, constituée de bras cassés, finira par se prendre au jeu et essaiera de faire tomber de gros poissons…

Scénario
Sur une trame archi rodée du film policier, le scénario est complètement addictif par cette vertu du cinéma américain : la DO-CU-MEN-TA-TION ! Les flics parlent vrai, les situations sont réalistes, aucun personnage n’est caricatural, même la flic noire lesbienne, ni l’alcoolo irlandais, ni le politicien corrompu, ni le baron de la drogue. Chacun a une famille, des raisons, des motivations, un passé…

Acteurs
Que des acteurs de série bien sûr, mais vu dans d’autres piliers télévisuels comme « Oz » par exemple… Tous plus justes les uns que les autres…

Images
Rien de spécial, très TV, donc très plat, mais adapté au point de vue : « ceci n’est pas un film d’action »

Humour / Frisson / Sexe
Un peu d’humour, peu de frisson, pas de sexe… mais horreur ! des sentiments !

Morale
1. Il y a toujours un plus gros poisson que celui que l’on est entrain de pêcher.
2. Seuls les politicards survivront…
3. … Mais on peut retrouver un semblant de dignité à ne pas leur obéir…

Plaisir :
en à voir ou pas ?
A voir bien sur, absolument… Saison 3 en cours aux USA.