dimanche 19 novembre 2006
Cthulhu!
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
« Ce qu’il y a de plus pitoyable au monde, c’est, je crois, l’incapacité de l’esprit humain à relier tout ce qu’il renferme. Nous vivons sur une île placide d’ignorance, environnée de noirs océans d’infinitude que nous n’avons pas été destinés à parcourir bien loin. Les sciences, chacune s’évertuant dans sa propre direction, nous ont jusqu’à présent peu nui. Un jour, cependant, la coordination de connaissances éparses nous ouvrira des perspectives si terrifiantes sur le réel, et sur l’effroyable position que nous y occupons, qu’il ne nous restera plus qu’a sombrer dans la folie devant cette révélation, ou a fuir cette lumière mortelle pour nous réfugier dans la paix et la sécurité d’un nouvel obscurantisme. »
C’est par ces mots que commence L’Appel de Cthulhu, le « chef d’œuvre » d’Howard Philips Lovecraft. Je met chef d’œuvre entre guillemets, parce que ce n’est pas forcément de la grande littérature ; mais comme la Terre du Milieu de Tolkien, Cthulhu est l’œuvre d’une vie. Celle de Howard Philips Lovecraft, écrivain passablement dérangé, raciste, sexiste, inconnu de son vivant, mais publié et adulé depuis. Sa vision tourne autour de l’univers Cthulhu et de lui seul, et pendant 30 ans, Lovecraft n’a fait que rétisser son ouvrage.
L’argument est le suivant : avant l’humanité, des dieux très puissants ont régné sur la terre, et en ont été chassés au fond des océans, dans l’antarctique, au cœur du bayou. Aujourd’hui (en 1920), des humains dégénérés perpétuent toujours un culte à ces sombres divinités, qui, quand l’alignement des astres sera propice, reviendront régner sur terre…
La nouvelle lovecraftienne est souvent bâtie sur le même canevas : le narrateur vient d’hériter d’une vieille maison d’un oncle bizarre qui vivait isolé du reste de la familleen Nouvelle-Angleterre. Le narrateur se rend sur place, et découvre l’existence de cultes adorant ces divinités d’outre-espace. Il lutte désespérément contre elles pour découvrir finalement qu’il est lui-même contaminé, que le sang des anciens dieux coule dans ses veines ; il ne lui reste plus qu’à rejoindre ses ancêtres.
Si quelques nouvelles avaient été adaptées par le passé (souvent de manière très décalée (Herbert West, réanimateur, par ex.), nous attendions tous l’adaptation de l’oeuvre originale, L’Appel de Cthulhu, il semble que ce soit chose faite puisqu’un film est en post-production ; une bande annonce est même disponible ici.
Reste à voir ce qu’Hollywood peut faire de cette mythologie tellement « gotham » (american gothic) ; la bande annonce est encourageante, voire impressionnante, mais le cast semble composé de parfaits inconnus ou débutants. A suivre, donc…
lundi 13 novembre 2006
Mon Voisin Totoro
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -
Les films ]
J’ai eu la chance de revoir ce Miyazaki avec la maternelle de mon fils. Voilà un film qui fait plaisir. Outre sa beauté plastique, Mon Voisin Totoro est un film qui donne tout simplement espoir dans le cinéma. Miyazaki ne s’embête pas avec le scénario : deux enfants et leur père vont vivre à la campagne pour se rapprocher de leur mère, malade. Les dialogues sont assez consternants : « Oh ma maman chérie, comme tu es belle aujourd’hui », etc.
Mais Miyazaki s’en fout : il a confiance dans le cinéma, il a confiance dans SON cinéma. Pas de cadrage délirant, pas d’image de synthèse, pas d’effets spéciaux. Un montage tout bête, un changement de musique, puis du silence… En un plan, Miyazaki bascule de la chronique champêtre dans le film fantastique puis dans la féerie, ou (la fameuse scène sous la pluie) dans la poésie pure…
Les enfants, qu’on dit drogués à la télé, ne s’y sont pas trompés… ça ne mouftait pas !
A noter qu’il ressort en DVD, en coffret avec Porco Rosso, pour la modique somme de 30 Euros…
lundi 13 novembre 2006
Les Fils de l’Homme
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
Voilà un film étonnant. Un film qui frôle le chef d’œuvre, sans jamais y sombrer. Un film d’une maestria incroyable, une vision hallucinante du futur, et un ratage total. Enfin, pas total, parce qu’on ressort quand même abasourdi. Doublement, même. Scotché par une telle prédiction de notre futur, rendu si prégnant par la qualité des décors, des accessoires, des costumes, des paysages : notre futur est là, sous nos yeux. On n’est pas dans Blade Runner (le futur noir), ni dans Minority Report (le futur blanc), non, on est dans le futur gris. Gris comme la vie de tous les jours. C’est la guerre, partout, comme aujourd’hui. Il y a des attentats, comme aujourd’hui. Des riches, des pauvres. Juste une petite différence : y’a plus d’enfants. Nulle part.
C’est là que ça commence à se gâter : les questions se bousculent dans la tête : « Pourquoi ? Comment ? ». On les repousse du bout d’un neurone, habitué qu’on est au scénario écrit au dos d’une boite d’allumettes de la production US. « C’est pas le problème ! » nous dit Hitchcock. Il est gentil, Hitchcok, mais il est anglais ! Et Les Fils de l’Homme, un film américain produit par Universal, qui se passe en Angleterre ? C’est louche… D’habitude, ils les adaptent ; dans le même genre, Spielberg avait situé sa Guerre des Mondes aux Etats-Unis…
Alors ca nous titille cette histoire, ces enfants qui manquent, tout ça… Mais heureusement, ça progresse : il en reste un, un enfant, qui reste à naître… Problème, il est dans le ventre d’une réfugiée, et il fait pas bon être réfugiée dans l’Angleterre de 2027. Alors le héros, il est contacté par son ex femme pour trouver un passeport, qui lui permettrait d’accoucher en pleine mer, auprès d’une mystérieuse organisation baptisé le Projet Humanité. Evidemment, le héros, Clive Owen, il veut pas au début, et puis ensuite, il veut. Et le reste du film va se dérouler de péripétie en péripétie, toutes aussi prévisibles les unes que les autres. Le héros et le femme enceinte sont pourchassés, ils s’échappent. Et, incroyable, les méchants les retrouvent une fois, deux fois. On ne sait pas trop comment ils font, mais ils y arrivent. Mais nos héros s’échappent à nouveau. L’héroïne accouche dans une sorte de camp de concentration ; et elle s‘échappe. Si ! Si ! Je ne vous dévoile pas la fin, tellement elle est difficile à deviner. Tout ce qu’on peut dire, c’est qu’on ne saura rien du projet Humanité…A la place, y’a un running gag de choix de prénom…
En bref : WHERE IS THE FUCKING SCENARIO ?
Là, je sens mes contempteurs habituels protester… « Il fait pas tout le temps le malin, le Professore ! Quand c’est le scénario de Spielberg ou Michael Bay, on l’entend pas gueuler aussi fort !!! »…. Eh oui ! C’est tout le problème des Fils de l’Homme : c’est une grosse connerie américaine déguisée en film d’auteur. Quand on voit ce film, on pense au Stalker de Tarkovsky, à Full Metal Jacket… on pense aussi à ce que V for Vendetta aurait pu être. Je le répète, ce film est un film incroyable, dotée d’une vision hors du commun, et qui mérite d’être vu rien que pour ça ! Mais il faut respecter le genre : si on fait un film aussi ambitieux, il ne faut pas prendre les spectateurs pour des neuneus. Si, au contraire, on fait dans le divertissement, il ne fallait pas être aussi sérieux…
samedi 11 novembre 2006
Borat !
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
CineFast n’a pas pour habitude de préjuger des films avant de les avoir vu, mais pour Borat ! On fait une exception. Parce qu’on a déjà vu les pitreries de Sacha baron Cohen dans son délirant Da Ali G show (le show sur Channel Four, pas le film calamiteux).
Le principe de Borat est simple : Sacha, déguisé en reporter kazakh, pénètre dans toutes les institutions anglaises avec sa caméra (le collège d’Eton, les bourges de St John’s Wood), leur fait croire qu’il réalise un reportage pour la télé kazakh sur « gigantesque culture britannique », et évidemment, leur fait dire les pires horreurs sur les femmes, les noirs, les homos, etc.
Cette fois-ci, Borat s’attaque à l’Amérique ; Le gouvernement kazakh aurait même déposé une protestation officielle ; le film est réalisé par Larry Charles (producteur de Seinfeld et Curb your Enthusiasm)… à ne pas rater, donc !
Yam shamash !!!
Et vous pouvoir trouvé très bonnes information sur Kazakhstan sur site officiel, là :http://www.borat-lefilm.com/
dimanche 5 novembre 2006
Le Chanteur de Mexico
posté par Professor Ludovico dans [ Le Professor a toujours quelque chose à dire... ]
Ca n’a pas grand chose à voir avec le cinéma, puisque ça se passe au Théâtre du Châtelet, et que c’est une opérette immortalisée par Luis Mariano, Bourvil, et Annie Cordy. J’en vois déjà au fond de la classe qui pensent que le Professor Ludovico a pété un câble. Loin de là. Il faut courir voir Le Chanteur de Mexico, un spectacle comme on n’en fait plus : drôle, simple, pétant de couleur et d’optimisme. Très loin donc, du pessimisme et du sarcarstisme ambiant. Oh lala, mais il a va vraiment pas bien, le Professor ! Il va nous appeler à voter Sarkozy et à lire La France Qui Tombe de Nicolas Baverez ? Pas du tout. Le Chanteur de Mexico c’est peut être l’art à portée des caniches, comme disait l’autre, mais c’est aussi tout simplement du plaisir basique : couleur, danse, chansons, etc. Y a-t-il une honte à prendre du plaisir ? Faut-il ne s’intéresser qu’aux problèmes de l’exclusion, dans les films kurdes palmés dans les Alpes Maritimes ?
C’est ainsi que revenant à ses moutons CineFastiens, le Professor se permet de faire remarquer qu’Hollywood n’a jamais été aussi grand que lorsqu’il produisait des comédies musicales : Singing in the Rain, Un Américain à Paris… Bubsy Berkeley, Gene Kelly, George Cukor…
Vous ne saviez pas que le Professor Ludovico était une midinette ? Maintenant c’est fait !
vendredi 3 novembre 2006
MGM se réintéresse à la production ?
posté par Professor Ludovico dans [ Hollywood Gossip ]
MGM a décidé de relancer avec Tom Cruise/Paula Wagner (récemment virés de la Paramount par Sumner Redstone) le mythique studio United Artists, fondé notamment par Charlie Chaplin et Mary Pickford. Le studio, créé par des artistes, pour les artistes, coula après l’échec retentissant des Portes du Paradis de Michael Cimino.
Que vient faire Tom Cruise dans cette galère ? remonter la pente, après la baffe de la Paramount… Et peut être monter la suite de Battlefield Earth ?
vendredi 3 novembre 2006
Mémoires de nos pères
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
Ah, magie du cinéma ! Ah, versatilité infinie du public ! Même le Professor Ludovico n’échappe pas à cette terrible malédiction. Il aime ce film raté, lui qui voue aux gémonies, chaque jour que Dieu fait, tous les scribouillards à la petite semaine qui ne savent pas finir un scénario ! Peut être que le Professor est un peu trop accro à la Seconde Guerre Mondiale ? Peut être que cette histoire de vrai-faux héros lui tripote les entrailles ? Pourtant, on n’y comprend rien à ce film ! Où est votre histoire, M. Eastwood ? Où sont les personnages, M. Haggis ? On n’y comprend rien, à vos Drapeaux de vos Pères ! On a même l’impression que Eastwood (et Spielberg, co-producteur) courent après des lièvres qui ne sont pas rattrapables : l’anti-héroïsme de Voyage au Bout de l’Enfer, la reconstitution « terrain » de La Ligne Rouge, le réalisme effréné de Il Faut Sauver Le Soldat Ryan… Tout cela échoue, se mélange, mais l’intrigue progresse.
Car passé cette première demi-heure, et ses multiples flash-back, flash-forward, quand les fumées des obus de 400 se dissipent, on commence à y voir plus clair. Donc il y a un fils, aujourd’hui, qui cherche des témoins pour lui parler de son père, un des trois « héros » qui ont planté le drapeau à Iwo Jima, ce moment connu de tous, grâce à une photo historique … Mais ce père, l’un de ces soldats que l’on voit grenouiller sur la plage d’Iwo Jima, c’est qui ?
Puis il y a ensuite cet indien, qui n’a pas de nom, et qui ne veut pas être un héros. Au cours du film, on découvre son prénom, Ira. Ceux qui aiment Johnny Cash reconnaissent alors Ira Hayes, et sa Ballade du même nom. Et comprennent tout de suite son destin tragique. On progresse… On passe ainsi de la bataille d’Iwo Jima à ses préparatifs, pour revenir au fils qui cherche aujourd’hui le héros dans le père, puis on retourne après la bataille, assister à la médiatisation des « héros » d’Iwo Jima, pour revenir encore et toujours à la bataille elle-même…
Petit à petit, dans cette confusion, le puzzle s’assemble pourtant. C’est déstabilisant, mais ça sert aussi le propos. Comme le dit un protagoniste « Nous n’étions pas des héros, c’est vous qui avez fait de nous des héros. Vous voulez toujours qu’on vous raconte une histoire… » Message qui pourrait tout aussi bien s’adresser au spectateur !
Mais Clint Eastwood, lui, se refuse à raconter une histoire : à la guerre, il n’y aucune logique, il n’y a pas de début, pas de fin. Il n’y a pas de héros, il n’y a pas de méchants*. Il n’y a pas de parcours christique : le petit gars du Texas venu se sacrifier sur les plages du Pacifique pour planter la star spangled banner, ça n’existe pas ! D’ailleurs, cette scène de drapeau est incroyablement filmée, en temps réel, quasi documentaire, ça pourrait être de la vidéo : ce moment héroïque, c’est juste des gars qui cherchent un bout de ficelle pour faire tenir un drapeau sur un tube en métal ?
C’est ainsi qu’Eastwood avance ses pions, petit à petit, et gagne la partie. Il réussit un film raté par endroits, mais passionnant de bout en bout. Et surtout, fait passer un message compliqué. Une gageure, surtout aujourd’hui.
*Eastwood en fera la démonstration l’année prochaine, en filmant Iwo Jima du côté japonais : Letters from Iwo Jima
mercredi 1 novembre 2006
MGM renonce à la production
posté par Professor Ludovico dans [ Hollywood Gossip ]
Une nouvelle qui est passée quasi inaperçue la semaine dernière (dans Le Figaro Médias tout de même) mais qui, pourtant, est assez révélatrice. Harry Sloan, le PDG de MGM (aujourd’hui une mini-major, loin de ce qu’elle fut dans les années 50) a annoncé qu’elle ne produirait plus de blockbusters, ces grosses machines qui coûtent au moins 150M€ et qui doivent en rapporter le double. Au cours d’un séminaire avec ses cadres, il a décidé de recentrer la MGM sur son « métier de base », à savoir la distribution. Qu‘en termes choisis ces choses-là sont dites ! Il entérine tout simplement l’échec d’Hollywood en ce moment, faisant le constat que les films coûtent de plus en plus cher et tout simplement, trop chers : « Les grandes majors ne savent plus produire, leur modèle est mort. Depuis plusieurs années, elles sont dans une dérive des coûts mettant en péril leur rentabilité et menaçant leur équilibre économique. » Et que dans cette industrie de prototypes, un prototype de 150M€ qui se plante met en danger l’entreprise MGM.
Fort de ce constat, Harry Sloan préfère que la MGM distribue les films indépendants de la salle au DVD, en passant par la VOD, ce qu’elle sait faire. Les indépendants, eux, savent faire des films à l’ancienne (autour de 60M€, tout de même !), mais sans cachet de stars exorbitants, et surtout sans campagne promo à 50M€ !
PS En parlant de prototypes, et de séries, une autre info a retenu notre attention. TF1, qui ne veut plus diffuser de films le dimanche soir (pas sûrs de faire 30% de l’audience, alors qu’avec « Les Experts », on peut garantir une part de marché), diffusait hier soir Le Seigneur des anneaux : Les Deux Tours. Pourquoi ? Parce qu’on peut garantir sur trois soirées une part de marché équivalente…
mercredi 1 novembre 2006
Thank your for smoking
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
C’est un peu le reproche que l’on peut faire au cinéma indépendant en ce moment : c’est gentillet. Ici, c’est gentillet et malin. Thank your for smoking s’attaque en apparence à une cible facile – les lobbyistes du tabac – mais retournent machiavéliquement le spectateur en s’attaquant aussi à la partie adverse : les lobbies anti tabac. L’histoire tourne aussi de l’éternelle (et pour tout dire ultra chiante) « father and son relationship ». Mais ça aussi, il réussit à s’en moquer gentiment. Le reste est à l’avenant, drôle, pédagogique, et pas ennuyeux. Mais on aurait envie que ça morde un peu plus…
mercredi 1 novembre 2006
The Queen
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
Voilà un film qui ose, mais peut être pas assez… The Queen raconte, du côté d’Elisabeth II et de son entourage, la semaine qui sépara la mort de Diana de son enterrement. Et c’est tout simplement shakespearien : La reine, coincée dans ses traditions et qui tient enfin sa vengeance psychologique sur la « Princesse du Peuple » ; son mari, falot, qui la soutient, son fils Charles, qui en profite pour prendre ses distances et régler quelque conflit oedipien, et surtout Tony Blair, débutant premier ministre qui s’empare de cette affaire pour, une fois de plus, asseoir sa popularité.
Mais le film est plus malin que ça, chacun va révéler un côté alternatif : Charles ne peut s’empêcher d’être triste, Blair finit par compatir pour la reine, et Elizabeth elle-même, au cours d’une surprenante métaphore animalière, va elle aussi « heurter le mur » comme disent les anglais.
C’est remarquablement joué, rapide, malin, et drôle. Le seul reproche qui reste néanmoins, c’est que ça aurait pu aller plus loin… Plus dans la tragédie, ou plus dans la comédie… Ce qui fut probablement impossible à réaliser avec des protagonistes connus de tous et encore vivants…