Ce n’est pas vraiment du cinéma, mais bon ! J’ai découvert cette jeune fille vendredi, et je suis déjà amoureux. 24 ans, toutes ses dents, c’est comme si Diana Ross (période Supremes) et PJ Harvey (période Dry)avaient eu une fille ensemble, de quelques amours contre-nature. Une voix rauque, des mélodies soul puisées directement Motown, mais avec l’énergie et la méchanceté d’aujourd’hui.
Nouvel Album, « Back to Black »
A croire qu’on n’apprend jamais. Le film à twist, ça marche pas ! Hitch vous a déjà expliqué ça vingt fois. Le public de fout du whodunnit ?, comme il se fout, ici, du howdidhedoit ? Et c’est triste, parce que L’illusionniste, c’est probablement le premier mauvais film de l’immense Edward Norton.
L’histoire, déjà, est invraisemblable : un illusionniste retrouve quinze ans après, dans l’Autriche du début du siècle, son amour de jeunesse. Pas de bol, elle va se marier avec l’héritier du trône. Comme ils s’aiment très fort, elle tente de s’enfuir, mais elle est assassinée par le méchant héritier. Pendant des années, notre héros va chercher à se venger, de-la-seule-manière-qu’il-connaisse : l’Illusion. Il crée un spectacle de magie où il fait parler les morts. Sa chérie apparaît et dénonce le prince héritier. Celui-ci, déboussolé, se suicide. Notre héros, le cœur serein, échappe à la police et rejoint, au fin fond du Tyrol, sa chérie…
– Euh ??? On peut rembobiner, là ? Je croyais qu’elle était morte.
– Ben, non, c’était une illusion…
– ??? Ben alors pourquoi il s’est vengé ???
– …
– Et pourquoi il passe des années à monter son spectacle pour dénoncer un crime qui n’existe pas ?? alors qu’il pourrait faire des chiards à Jessica Biel (la chérie) ?
– euh…
– Et le prince, alors, il s’est suicidé pour rien ?
– …
En plus de ça, le film se la joue carrément « clin d’œil – ironie dramatique » : on sait, grâce notamment au personnage du flic, qu’il y a une anguille dans le potage. Mais laquelle ? Au bout d’une petite demi-heure, on s’en fout. On attend. Parce que, de toutes façons, ça va venir, la révélation. Et on sait que ça sera nul…
Comme l’a théorisé mon ami Olivier B., ces films sont malhonnêtes (il prenait 9 reines en exemple, qui est pourtant d’un tout autre niveau) ; car il est facile d’embrouiller le spectateur. Le réalisateur a toutes les billes en mains, il peut faire ce qu’il veut ; il est le dieu omniscient de son univers. Le génie, c’est justement de laisser des indices et d’associer le spectateur à un personnage, pour lequel on se préoccupe, quelqu’un pour qui l’on vibre. Pour cela, il faut l’imminence d’un danger, la concrétisation d’un péril. Le principe de l’enquête ne marche pas au cinéma.
Il est 100 fois plus payant de craindre Dark Vador que de chercher qui est Dark Vador. Un excellent exemple de cette contradiction est fourni par la géniale de BD d’Alan Moore, From Hell : on sait qui est Jack L’Eventreur, et on tremble à chacun de ses actes, des mots qu’il prononce. Dans le film, on doit chercher qui il est (si on a lu la BD, c’est doublement raté). Le twist peut fonctionner comme accessoire, comme dans Usual Suspects, qui est un twist ironique : on cherche qui est Keyser Soze, alors qu’il est là, devant nous. Mais ça ne peut être le ressort de la relation si particulière qui unit le spectateur, son cul posé dans le noir si douillet de l’UGC Bercy, venu, selon la belle définition de David Lynch « mourir, passer un bout de temps à rêver, et revenir »…
Si vous avez raté le Libération/Charlie Hebdo de mercredi, votre erreur est double. Non seulement les deux journaux, faisant « Une » commune, se payaient la tête des intégristes musulmans (à l’occasion de cet improbable imbroglio politico-judiciaire de cet fin de règne chiraquien), mais en plus, un journaliste de Charlie Hebdo (Jean-Baptiste Thoret) laminait une autre forme d’intégrisme : le cinéphile à tendance festivalière. Dans une tribune libre*, il fustigeait le « Film d’Auteur Académique », baptisé FAA, dans une démonstration tout aussi impeccable qu’implacable.
Sa théorie est simple : s’il existe des films commerciaux, formatés pour plaire au plus grand nombre, il existe en face le FAA, tout aussi formaté. Le FAA s’acharnent, selon Jean-Baptiste Thoret, à se poser en négatif du film commercial, pour mieux séduire le Jury du Festival du Film de Séoul, Berlin, Venise, ou mieux, la Palme des Alpes Maritimes. Au final, le FAA est tout aussi formaté et ennuyeux : « le FAA, écrit-il, confond l’épure et le rien, l’abstraction et la pose, le vide et la raréfaction, la contemplation et l’ennui, l’enregistrement de la réalité et la vérité du réel, qui – on le sait depuis les frères Lumière – n’a de chance d’advenir qu’à condition d’en fabriquer la fiction (…) le FAA [refuse de] céder aux sirènes du plaisir, de la forme, du spectacle ; en bref, il témoigne d’une haine de la fiction. » Quel meilleur plaidoyer pour le retour du scénario, que nous appelons de nos vœux, ici sur CineFast ?
* à l’origine de cette tribune, un édito de Jean-Michel Frodon, rédac’chef des Cahiers du Cinéma (et non pas Porteur de l’Anneau, comme beaucoup semblent encore le croire), s’indignant que le CNC se plaigne de l’existence de plus en plus fréquente de « Films de Festival »