mercredi 25 février 2009
Le Code A Changé
posté par Professor Ludovico dans [ Brèves de bobines -
Les films ]
Danielle Thompson est douée, dommage qu’elle soit aussi fainéante. Scénariste sous-évaluée, dans un cinéma français qui surestime les réalisateurs, hait stupidement les producteurs, et ignore les scénaristes.
A 24 ans, Mlle Oury fille signait déjà La Grande Vadrouille avec papa, puis une trentaine de scénarios : La Folie des Grandeurs, Rabbi Jacob, La Boum, La Reine Margot, Ceux Qui m’Aiment Prendront le Train…
Récemment jetée dans le bain de la réalisation (La Bûche, 1999), elle n’a signé que quatre films (Fauteuils d’Orchestre, Décalage Horaire Le Code A Changé).
Ici, c’est un scénario qui part bien : Karine Viard, vibrionnante avocate, réunit dans un dîner très parisien amis, famille, relations plus ou moins proches. Thompson décrit lentement la catastrophe à venir, en filmant les icebergs en formation (l’amant qui s’incruste, la fille qui refuse de revoir le père, l’épouse qui ne veut pas venir). C’est lent, mais bien installé : la soirée Titanic va couler, aussi sur que deux et deux font quatre. Autre belle idée, on interrompt le dîner à mi-parcours, pour retrouver les mêmes un an après. Façon intelligente de montrer l’évolution des personnages, après l’impact du fameux dîner, tout en évitant des longueurs inutiles. Bref, les dialogues sont percutants, les situations « à la française » s’enchaienent comme au champ de tir, on passe un bon moment.
Ou est le problème alors ? Et bien, avec un peu de travail, ça serait beaucoup mieux. Le casting est un peu raté (Karine Viard avocate, bof !), les acteurs n’ont visiblement pas assez répété et assurent le service minimum (Emmanuelle Seigner et Patrick Bruel sont ceux qui s’en tirent le mieux, c’est dire). Les décors font cheap, c’est mal éclairé, la fin n’est pas assez travaillée, etc.
Dommage (mais allez-y quand même)…
mercredi 25 février 2009
Les Noces Rebelles
posté par Professor Ludovico dans [ Brèves de bobines -
Les films ]
Sam Mendes a un problème. Après American Beauty, il livre avec Les Noces Rebelles un nouveau brûlot anti-banlieue. On peine à comprendre pourquoi tant de haine, et c’est tout le problème de ce joli film.
Les acteurs (Di Caprio-Winslet) sont excellents. Le sujet (l’éclosion des droits des femmes, au coeur des années 50) est passionnant. Mais voilà : avec tout ça, le beau Sam ne sait que faire. La douleur de la vie de banlieue, on ne la comprend pas, car tout a l’air d’aller pour le mieux dans le meilleur de smondes. On peut comparer ça à Desperate Housewives, toute aussi haineuse sur la banlieue. Mais au moins, dans la série de Marc Cherry, on comprend (même si on est pas d’accord avec la caricature) : la banlieue, c’est un royaume des faux-semblants, des intrigues sordides et des coups bas entre pseudo-amies.
Ici, rien de tel : les voisins sont sympas, tout juste un peu neuneus. Kathy Bates, l’agent immobilière, est une mère pour eux*. Et surtout, on n’éprouve aucune compassion pour Kate Winslet, car on ne sait rien d’elle. Pire, on souhaite qu’il lui arrive enfin quelque chose, pour enfin s’apitoyer. Ce qui arrive finalement, mais trop tard.
*La dernière scène, qui inverse la personnalité de Bates, tombe complètement à côté de la plaque
mercredi 25 février 2009
Joy Division
posté par Professor Ludovico dans [ Brèves de bobines -
Les films ]
Dans la famille Joy Division, y’a deux clans. Soit on est du côté de l’épouse du défunt (Deborah Curtis), c’est l’option Control, soit on est du côté de la maîtresse (Annik Honoré), c’est l’option Joy Division, le film.
Ici, contrairement à Control, on est dans le documentaire, et évidemment, c’est moins fort. Mais ça reste passionnant, tant du point de vue des témoignages (les membres du groupe sont sûrement les plus sincères de toute l’histoire de la rock music), que de la thèse (Joy Division aurait tout simplement permis à Manchester de se réinventer).
Alors évidemment, c’est plutôt réservé a ceux qui aiment le groupe, ou à ceux qui veulent découvrir un peu le groupe le plus mystérieux, le plus troublant dans l’histoire pourtant tourmentée du rock. Quand aux autres, – sait-on jamais – les chemins de traverse sont ceux qui mènent le mieux à la musique de Joy Division.
mercredi 25 février 2009
Fais pas la tête, David !
posté par Professor Ludovico dans [ Brèves de bobines -
Hollywood Gossip ]
3 Oscars techniques ? Mais c’est une bénédiction ! C’est le sort réservé au grands : Welles, Kubrick ! 3 Oscars techniques, c’est ce qu’a eu Barry Lyndon ! Benjamin Button, ça sonne presque pareil… Allez, pour te consoler, j’irai voir ton film cette semaine…
dimanche 22 février 2009
Valkyrie
posté par Professor Ludovico dans [ Brèves de bobines -
Les films ]
Sacré Tom Cruise. On ne peut pas dire qu’il fasse les choses à moitié ! Comme il l’a déclaré à l’autre limande de Laurent Weiss, Tom a exigé de voler dans des vrais Junker 52 dans le film, et c’est le « vrai bruit du moteur qu’en entend » !
Bon, mais à part ça, le cinéma, il est où ? A part ça, que dire du film ? Si vous aimez l’Histoire, avec un grand H, Valkyrie, c’est intéressant, mais si vous aimez le cinéma, c’est juste le Plat du Jour. Bien fait mais sans plus, le film sombre de toutes façons comme n’importe quel BOATS : on sait comment ça va finir !
Reste Tom Cruise, toujours aussi fascinant dans cette auto-détestation de lui-même.
Et autre chose : la preuve définitive que Bryan Singer n’était qu’un faiseur (mais un bon faiseur), puisqu’en s’adjoignant les services de son compère Christopher McQuarrie, ils ne retrouvent pas la magie de Usual Suspects.
dimanche 15 février 2009
Les Rois Maudits
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -
Séries TV ]
Avec quarante ans de retard, j’ai attaqué cette série culte de la télé Française. Plus par curiosité historique (j’adore le Moyen Age), que par appétence télévisuelle.
Évidemment ça a pris un coup de vieux : décor seventies minimalistes (des murs peints), dialogues empesés, jeu théâtral, mise en scène inexistante, et filmage approximatif.
Une borne, en fait, pour mesurer combien la télé a changé aujourd’hui. Plus beau, plus rapide, plus « cinéma » : la télé a appris.
Mais bon, c’est vraiment intéressant. C’est pédagogique, on a envie d’en savoir plus, et c’est bien joué, on va donc regarder la suite.
dimanche 15 février 2009
Vive Danny Boon !
posté par Professor Ludovico dans [ Le Professor a toujours quelque chose à dire... -
Les gens -
Pour en finir avec ... ]
Bon, j’ai très peu de considération pour Bienvenue chez les Ch’tis, et encore moins pour les Césars. C’est pourquoi je soutiens chaleureusement le boycott de ladite cérémonie par le comique, et également son idée d’un César de la comédie.
Ce qui éviterait la surreprésentation des drames et autres « performances d’acteurs » qui empoisonnent ce genre de remise de décorations : Darling, My Left Foot, Le Scaphandre et le Papillon, etc. Jouez un aveugle, un estropié, un schizophrène profond, un cowboy pédé, et c’est l’Oscar/César/Ours berlinois/Palme maritime garantie. Et quoi qu’on en dise, la plupart de nos comédiens ne rechignent pas devant les récompenses, et décorations. C’est ainsi que Robert Evans convainquit Mia Farrow de dire non à Sinatra et oui à Polanski (décision risquée, vu les petits amis du rital) : « Si tu finis Rosemary’s Baby, je te garantis l’Oscar ! »
Si les Oscars ne valent pas mieux que les Césars, ils ont au moins le mérite (ils sont américains, après tout !) d’être plus près des goûts du public. Et s’ils encensent My Left Foot ou Brokeback Mountain, il couronnent aussi systématiquement les gros succès publics (Autant en Emporte le Vent, Titanic).
Mais, comme les Césars, pas les comédies…
Genre maudit depuis toujours, faire rire n’est pas noble. Au panthéon des comédiens, pas d’humoriste, pas d’imitateur, pas d’acteur comique, mais uniquement des tragédiens. Pire : quand ces derniers s’aventurent dans la comédie, c’est instantanément salué (Deneuve, de Niro…), mais quand les comiques attaquent l’Everest de la Tragédie, ils sont attendus au tournant (Jim Carrey, Coluche).
Sociologiquement parlant, il faut comprendre que le jury des Césars (3500 votants) est composé essentiellement de professionnels du cinéma, en majorité âgés. C’est eux qui nominent les films, et ensuite votent pour ces films.
C’est pourquoi, évidemment, ils dédaignent Le Grand Bleu (un film qu’ils ne sont probablement même pas allés voir à l’époque) ou, aujourd’hui, Bienvenue Chez les Ch’tis, Mesrine, « films de jeunes », réalisés par la nouvelle génération de cinéastes français, qui n’ont pas les appuis qu’il faudrait pour susciter un maximum de votes.
Donc oui à un César de la meilleure comédie, mais pas pour Bienvenue chez les Ch’tis ! Cette année, je donnerais plutôt la statuette à Un Conte de Noël, où j’ai bien ri, ou mieux encore, à Burn After Reading…
dimanche 15 février 2009
Recoller les morceaux
posté par Professor Ludovico dans [ Le Professor a toujours quelque chose à dire... -
Séries TV ]
Petit à petit, la maladie s’étend… Après avoir contaminé Adrien, puis Michel, Aymeric, de nouveaux clients viennent pour réclamer leur dose de The Wire. Évidemment, maintenant, c’est plus cher : trois épisodes minimum, les gars !
Il est arrivé à Michel une anecdote étonnante, et plus ou moins la même à votre serviteur.
The Wire étant une fresque gigantesque de destins entrecroisés, on s’habitue à recoller les morceaux. Truc est avec Machine, et Bidule sort de taule… Michel est ainsi passé de l’épisode 6 à l’épisode 10, sans se rendre compte de rien ! Au contraire, il a recollé les morceaux, tant Sur Écoute avance doucement, et logiquement. Pour ma part, j’ai regardé le dernier épisode de la saison 4 avec admiration devant tant de retenue, tant de refus devant les effets faciles les cliffhangers, au moment où je me suis rendu compte qu’il restait encore un épisode !
Tout ça pour dire que la magie du cinéma est là, tout comme la BD : elle oblige le cerveau à associer deux plans (ou deux cases) et à faire tout seul un lien entre les deux. Michel a raccordé les différentes intrigues pour retomber sur ses pieds, et moi, habitué aux figures de style de fin de saison, j’ai interprété différemment chaque scène de l’avant-dernier épisode…
Mais le cerveau interprète, analyse, garde en mémoire les conventions, et fait le travail à la place du scénariste. C’est aussi pourquoi quand quelque chose cloche, le cerveau, inconsciemment, s’en rend compte aussi. Et décroche.
dimanche 15 février 2009
Ce qui cloche avec les Tudors…
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -
Les films -
Séries TV ]
Série sympathique au demeurant, pédagogique, sexy, les Tudors avaient quand même un défaut, mais lequel ?
C’est en regardant simultanément l’épisode 13 de Sur Écoute saison 4 et l’épisode 2 des Tudors saison 2 que j’ai compris. Là où la série US est moderne, c’est dans le montage. Surchargée de personnages, The Wire passe de l’un à l’autre sans explication préalable : à vrai dire, nous ne connaissons même plus le nom des personnages. On prend les scènes en cours de route, et on les coupe avant la fin… Selon la loi non écrite qui veut qu’une scène change de polarité entre le début et la fin.*
Les Tudors sont, sur ce point, restés dans le canon de la tradition du film historique. Il y a beaucoup de personnages, mais chaque scène a un début et une fin classique : le domestique vient voir la reine : « Votre Altesse, Sire Thomas More désire vous voir !» « Qu’il entre ! » Il entre. « Bonjour Sir Thomas ! » « Bonjour Votre Altesse ! » La scène peut enfin commencer. Autre vieillerie : les personnages sont debouts, et échangent des informations oralement… dans la plus stricte tradition des Rois Maudits !
Les séries plus modernes ont assez confiance dans le cinéma pour faire passer des idées visuellement : dans Sur Écoute, un simple bruit de pas rappelle que l’équipe est cantonnée dans un local miteux, et que leur condition reste précaire… Dans Burn After Reading, la seule coupe de cheveux de Brad Pitt donne une idée de la superficialité du personnage, dans Alien, les conflits entre les mécanos et le poste de pilotage sont symbolisés par un jet de vapeur qui empêche toute conversation, et au mitan de Barry Lyndon, la fumée d’une pipe jetée au visage de Lady Lyndon inverse le sens du film. Nous étions pro-Barry, nous voici dans le camp des antis.
Des détails, mais qui font la différence entre une mise en scène lourdingue et une mise en scène subtile…
*Par exemple si un personnage entre heureux au début de la scène, il doit en sortir malheureux à la fin de celle-ci, sans quoi la scène n’aura pas fait avancer l’intrigue ni apporté d’information au spectateur…
dimanche 15 février 2009
La Folle Journée de Ferris Bueller
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -
Hollywood Gossip -
Les films -
Les gens ]
Étrange destin que celui de John Hugues, le Citizen Kane de la teen comedy. Et très hollywoodien, en même temps : ancien pubeux, rédacteur de blagues (c’est un métier, là-bas !), scénariste, John Hughes explosa vraiment dans les années 80 en créant un genre à lui tout seul (la teen comédie intelligente) et en révélant toute une génération d’acteurs, le brat pack (Emilio Estevez, Rob Lowe, Bill Paxton, Charlie Sheen, Kevin Bacon, Robert Downey jr).
Disons le : ces films, nous les avons adoré : Breakfast Club, Une Créature de Rêve, La Folle Journée de Ferris Bueller, She’s Having a Baby), John Hugues a accompagné notre adolescence, nos émois amoureux, nos premières responsabilités…
La Folle Journée de Ferris Bueller est le chef d’oeuvre, le climax de cette période : plus haut, plus loin, plus fort. Breakfast Club était la révélation intimiste, Une Créature de Rêve, le délire le plus parodique…. La Folle Journée de Ferris Bueller, c’est la synthèse : les autres seront biens, mais moins bons.
Le pitch, pour ceux qui ont plus de quarante ans ou moins de trente ? Ferris Bueller est le petit chouchou d’une famille bourgeoise de Chicago, et tout lui réussit : ses parents l’aiment, sa fiancée est magnifique et intelligente (Mia Sara), et il est l’idole du lycée. Aujourd’hui, il a décidé de prendre sa journée : il simule la fièvre, et évidemment, on le croit. Son odyssée dans Chicago va l’amener d’aventures en aventures, manquant à plusieurs reprises de se faire prendre par ses parents, le proviseur, ou sa sœur jalouse, mais passant à chaque fois, au culot. Ce ne serait qu’un film ado de plus, s’il n’y avait la Hughes’ touch. Plus on avance dans le film, et plus la comédie enfle, plus le propos devient paradoxalement sérieux : mariage, dépression, père abusif…. John Hughes a toujours eu le génie d’aborder des thèmes sérieux (la dépression des ados) au travers de films drôles, clairement marketés pour eux (il fut l’un des premiers à utiliser des groupes indépendants dans la BO de ses films).
Ainsi, voilà un cinéaste américain qui cite Molière (dans Breakfast Club) ou Seurat (dans La Folle Journée…) Des citations jamais gratuites : le gros plan sur la petite fille d’un tableau du maître pointilliste, utilisé en alternance avec le visage défait du copain dépressif de Ferris, reste le plus beau moment du film.
Après cette décennie prodigieuse, John Hughes réalisa des films de plus en plus mièvres, jusqu’à l’insupportable Curly Sue. Puis il sombre du côté obscur de la Force, en réalisant la trilogie Maman J’ai Raté de l’Avion, de sinistre mémoire… Depuis ces succès colossaux, qui aurait dû lui tailler une place de choix dans le panthéon hollywoodien. Au contraire, et inexplicablement, John Hughes préféra retourner à l’anonymat du métier de scénariste, sur des projets peu glorieux (la série des Beethoven). Il signe actuellement sous le pseudonyme d’Edmond Dantès. Tout un programme !