vendredi 28 août 2009
Breakfast Club/Une Créature de Rêve
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -
Les films ]
Les vacances c’est le lieu rêvé pour la cinéphilie, on se met au fond du lit, on branche le portable, et on initie les enfants au mystère John Hughes.
Mystère car œuvre il y a. Au bout d’une minute de Breakfast Club, le Professorino, 7 ans et demi dont 5 de Dora l’Exploratrice et 3 de DragonBall Z, avait déjà repéré que ça se passait « au même endroit que Ferris Bueller ».
Comment ? On ne le sait. Peut-être ce que justement on appelle une œuvre ; une façon de cadrer, d’éclairer, de caster, toutes ces choses parait-il inutiles, qui passionnent les cinéphiles, et ne concerneraient pas le spectateur lambda ?
En tout état de cause, même 25 ans après, les John Hughes tiennent la route. Breakfast Club plus que Une Créature de Rêve (Weird Science en VO), la comédie s’usant beaucoup plus vite que le mélo.
Non, le plus intéressant c’est de voir ce qui a changé. La place des noirs, par exemple : bluesmen caricaturaux des bas-fonds dans Une Créature, carrément absents dans Breakfast Club : totalement impensable aujourd’hui. Il y aurait au moins un élève noir, un prof noir. Rappelons qu’à l’époque, Eddy Murphy venait de décrocher le premier rôle noir dans les productions Simpson/ Bruckheimer…. Autre différence, le regard porté sur les jeunes : plein de compassion à leur endroit et plein d’agressivité contre les adultes, castrateurs, fachos et beaufs. De l’eau a coulé sous les ponts et le regard sur l’adolescence n’est plus aussi manichéen.
Pour le reste, les films restent toujours visibles (même si Ferris Bueller signe l’apogée du système John Hughes). Arrangez-vous néanmoins pour les voir en VOST, la VF était pourrie dans les années quatre-vingt, et maintenant elle est en plus horriblement datée..
jeudi 20 août 2009
Box-office, Don Simpson, le producteur le plus déjanté d’Hollywood
posté par Professor Ludovico dans [ Hollywood Gossip -
Les gens ]
Derrière ce titre ringard se cache la meilleure nouvelle de l’année, à savoir la traduction en français de du mieux titré High Concept: Don Simpson and the Hollywood Culture of Excess, la biographie signée Charles Fleming.
Une biographie séminale pour CineFast, puisque suite à un extrait publié dans Vanity Fair en 1998 (merci Ingela), je cherchais à me procurer à tout prix ce livre, introuvable en France. Je le dénichais l’année suivante dans un Barnes & Nobles de Bakersfield (et croyez-moi, les vendeurs US sont bien plus incultes qu’à la Fnac).
C’est comme si j’avais trouvé les manuscrits de la Mer Morte. Dans un genre où les américains excellent (la biographie non-autorisée), High Concept est passionnant à plus d’un titre. D’abord, c’est un livre qui parle de la production, alors que la plupart des ouvrages consacrés au 7ème art se focalisent sur les acteurs et les réalisateurs. Ensuite, il s’attaque aux Simpson- Bruckheimer, producteurs honnis car ultra-commerciaux et républicains : nous avons déjà eu l’occasion de dire ici tout le bien que nous en pensions. Enfin, fidèle à l’école américaine, c’est écrit de manière efficace (ça se lit comme un roman), tout en étant extrêmement bien documenté et étayé. Bourré d’anecdotes trash et en même temps analyse travaillée de l’évolution du business dans les années 80. Et, ce qui nous change de son équivalent français, un travail à la fois sérieux et agréable à lire.
On suivra donc avec passion les aventures de l’Oncle Don à Hollywood : attaché de presse dans les années 70, producteur hardboiled dans les années 80 (Flashdance, Le Flic de Beverly Hills, Top Gun), acteur mort-né, cocaïné, lifté, dans les années 90 (Bad Boys, USS Alabama, The Rock). Il dépensait alors 60 000 dollars par mois chez le pharmacien. Sexe, drogue, et antalgiques…
Don Simpson est mort bêtement (meurt-on autrement ?) : dans ses toilettes, nu, un livre à la main. Il avait 50 ans.
Box-office, Don Simpson, le producteur le plus déjanté d’Hollywood
Charles Fleming
Edition Sonatine
jeudi 20 août 2009
Lost, cinquième année au bagne
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]
Sans prévenir, dans la torpeur du 15 août, les gardes-chiourmes de TF1 viennent vous arrêter sur votre lieu de vacances, vous jettent dans une diligence cadenassée, direction Cayenne, ou ce qui s’en rapproche le plus : Lost, saison 5. Nous voilà repartis à casser des cailloux sur l’île, essayant, en vain, de comprendre ce que nous avons bien pu faire qui nous a valu de finir ici.
Le premier épisode est rocailleux, et on se dit que ça va pas le faire. Mais TF1, décidé à se débarrasser de Lost le plus vite possible (diffusion en catimini, à 23h10, on voudrait tuer la série qu’on ne s’y prendrait pas autrement, une véritable incitation au téléchargement illégal), a choisi dans sa grande sagesse, de nous passer trois épisodes d’affilée : et là, la lumière fut.
En amplifiant leurs petites galéjades sur le voyage dans le temps (quelques lectures mal comprises sur la Relativité Générale dans Wikipedia ?), les scénaristes ont trouvé un filon en or.
Aujourd’hui ? Il y a trois ans ? en 1954 ? Pendant la saison 1 ? Ou juste avant ? On ne savait pas où on était, maintenant on ne sait plus quand on est… à ce niveau d’escroquerie, ca devient de l’art, surtout de la part de JJ Abrams, le Gentleman Cambrioleur de la télé américaine, avec du charme et de l’humour.
Au milieu de l’épisode deux, Hurley finit par révéler à sa mère qu’ils ne sont pas les seuls rescapés de l’Oceanic 815, et se met à lui raconter la « vérité » : oui, ils se sont crashés sur l’Ile, où ils ont rencontré d’étranges fumées noires, mais aussi les Autres, qui ne sont pas si méchants que ça, puisque d’autres sont venus les attaquer sur un cargo qui depuis a disparu, parce que l’Ile a justement été déplacée. Réaction de la mère : « Je te crois. Je n’ai rien compris, mais je te crois »
Voilà ce que nous sommes devenus : des True Believers. Des Born Again Christian. Nous attendons l’arrivée imminente de Dieu sur terre. The Second Coming. La Vérité. La Vérité !!!
Non vraiment, une série qui se moque de sa propre intrigue ne peut pas être complètement mauvaise.
samedi 8 août 2009
The Wire, finale
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -
Séries TV ]
Au moment d’écrire ces lignes – il me reste un épisode de Sur Écoute (saison 5, épisode 10) à regarder – une drôle de sensation m’étreint, ce sentiment d’abandon si spécifique aux séries : nous allons, enfin, savoir la fin. Qui est le No 1 ? Qui dirige l’Ile des Disparus? Que va devenir Tony Soprano ? Scully va-t-elle épouser Mulder ? Dans les grandes séries, le cœur se serre, car l’on sait avec certitude que l’on se reverra plus.
C’est le cas de Sur Ecoute : adieu Major Colvin, Bunk et Greggs, adieu Omar et Mc Nulty, Daniels et Rawls, Barksdale, Stringer et Marlo. Vous êtes peut être déjà mort, en tôle, au chomedu, mais vous nous avez accompagné ces cinq dernières années…
Et bravo à HBO d’avoir réussi ce qui restera comme l’une des plus grandes séries réalisées, tout du moins LA série symbole des USA des années 2000.
samedi 8 août 2009
In Memoriam John Hughes
posté par Professor Ludovico dans [ Hollywood Gossip -
Les gens ]
John Hughes est mort à 57 ans, dans une rue de Manhattan jeudi dernier… En guise de nécrologie, Le Parisien a titré « Le scénariste de Beethoven est mort » Au moins, Le Parisien a fait une nécro. Ah, dure loi de postérité ! L’inventeur du teen movie méritait mieux que ça.
Heureusement, il y a CineFast.
John Hughes était avant tout scénariste, c’est vrai. Il a commencé dans la pub à Chicago et s’est lance ensuite dans un créneau inédit : le film intelligent pour ado. Sixteen Candles, ou l’immense Breakfast Club , qui nous révéla la possibilité d’un cinéma US intelligent et amusant, peut être le germe même de la CineFast Attitude. Puis vint Une Créature de Rêve, Rose Bonbon, Ferris Bueller Day Off : ses premiers films ont su saisir comme personne les ados des années 80, leurs problèmes, leur désespoir dans une Amérique reaganienne pourtant triomphante.
John Hughes lança aussi une génération d’acteurs, le brat pack, instantanément talentueux, riches, et célèbres, qui succomba tout aussi rapidement aux habituelles maladies Hollywoodiennes : sexe, drogues et alcool. Mais certains ont survécu, et ont fait un beau parcours : Matthew Broderick, Robert Downey Junior, Rob Lowe, Emilio Estevez…
Après, évidemment, John Hughes, sans être récupéré par Hollywood (il continua à écrire et produire ses films), se mit à mettre de l’eau dans son vin… Et à gagner beaucoup d’argent : l’horrible et dégoulinant Curly Sue, et la série des Maman J’ai Raté l’Avion, qui le rendit riche pour toujours.
Depuis, John Hughes s’était fait discret, écrivant des scénarios sous son nom ou celui d’Edmond Dantès (sic), dont les fameux Beethoven.
Tant pais pour le bon cinéma… Pour ce qui nous concerne, il reste une Ferrari gisant dans les arbres (Ferris Bueller), le désespoir dans les yeux de Anthony Michael Hall (Breakfast Club) et Kelly Le Brock faisant de la gym (Une Créature de Rêve)….
mercredi 5 août 2009
The Reader
posté par Professor Ludovico dans [ Brèves de bobines -
Les films ]
Il y a un truc qui cloche dans The Reader, et c’est difficile de dire quoi. On pourrait arguer qu’on n’est pas attiré par les personnages, mais c’est fait exprès. Derrière cette contrôleuse de bus sexy (Kate Winslet) se cache une ancienne gardienne d’Auschwitz, ça calme. Et le jeune berlinois, qui découvre ses premiers émois sexuels avec elle, découvrira aussi la Shoah, dix ans plus tard, lors de son procès, ça calme aussi.
Les comédiens sont excellents (Winslet, Fiennes, le jeune David Kross, et la montagne Bruno Ganz), mais bon ça ne décolle pas. Le message est là, très fort : c’est un film intelligent, qui donne à réfléchir, et propose un point de vue, un angle intéressant sur le sujet…
Mais pour ma part, j’ai trouve le film imbu de lui-même, le mélo à oscar dont les frères Weinstein se sont fait une spécialité, surligné au stabilo rose par l’énervante petite musique de chambre de Monsieur Nico Muhly. Madame la Professore, elle, a été scotchée par tout exactement le contraire, la retenue et l’extraordinaire sobriété du film.
A vous de voir…
mercredi 5 août 2009
Brüno
posté par Professor Ludovico dans [ Brèves de bobines -
Les films ]
Après Borat, Sacha Baron Cohen et confirme tout le bien -et tout le mal – qu’on pensait de lui.
Le bien, c’est que le cinéma proposé ici est révolutionnaire, mélangeant intrigue web (pré-scandale à la Fashion Week de Milan repris par les médias du monde entier, lancement via des annonces sur Twitter), télé-réalité et fiction. Mais c’était déjà le problème de Borat, c’est encore plus le problème de Brüno : impossible de démêler le vrai du faux.
Autant le procédé était vrai (et donc fort) dans l’Ali G. Show qui lança le caméléon sur Channel 4, autant aujourd’hui, l’interrogation est de mise. Que reste-t-il de vrai dans Brüno ?
Quand Brüno atterrit chez les échangistes hétéros, c’est plausible. Quand Borat prend des cours de maintien chez les bourges du Kentucky, pourquoi pas ? Mais Brüno roulant des pelles dans un match d’Ultimate Fighting au cœur de l’Oklahoma (en hommage au Wrestling Game d’Andy Kaufman, autre imposteur déjanté ?), ça commence à sonner faux. Comment la production a-t-elle réussi à convaincre les organisateurs de laisser Cohen présenter ?
Le problème, c’est que dès que le doute s’instaure, il mine le film. Et si rien n’était vrai ? Peu importe le message (les USA, pays effrayant de Politiquement Correct et de haine de l’autre), tout d’un coup, ça ne marche plus.
Comme si ce passage de la subversion (la télé européenne), au média global (le cinéma US) avait corrompu l’intégrité Cohenienne. Beaucoup d’argent, donc moins de créativité : l’éternelle malédiction de l’art !
Il ne reste aujourd’hui que des rires gras dans la salle, quand Brüno fait tourner sa bite, ou se bat avec des sextoys. Symptomatique du passage aux standards américains : l’obsession scato. Le rebelle est devenu un membre respecté de l’industrie.
mercredi 5 août 2009
Whatever Works
posté par Professor Ludovico dans [ Brèves de bobines -
Les films ]
On sait le peu d’estime en laquelle est tenu le new-yorkais ici, mais en fait c’est surtout son œuvre – très inégale – et le culte idiot qu’il suscite en France qui énerve. Cela n’empêche pas d’aller en voir quelques-uns, et certains sont bons, comme Whatever Works.
Premier atout dans la manche : Larry David. Allen s’est enfin trouvé un alter ego, qui peut dire son texte à sa place, et qui est infiniment plus crédible. New-yorkais comme lui, irascible comme lui, il a dix ans de moins, et peut donc encore séduire une jeunette en toute impunité… il ressemble aux seniors d’aujourd’hui, en short toute la journée, fan de jazz et de base-ball.
Larry David n’a pas à se forcer, il a écrit pendant des années les méchants scénarios de Seinfeld, et a déjà prouvé ses talents de misanthrope dans l’excellent vraie-fausse sitcom sur lui-même, Curb your Enthusisam (Larry Dans Tous Ses Etats).
Pour David, Whatever Works, c’est seulement des heures sup’ : professeur de physique, spécialiste de la Théorie des Cordes (« presque nominé pour le Nobel »), divorcé d’une femme belle et intelligente, hypocondriaque et spécialiste de la détestation de l’humanité, Boris Yellnikoff a tout pour plaire.* Quand il rencontre une jeune SDF, Marie Anne Celestine (Rachel Evan Wood), paumée à NY depuis qu’elle a fui sa famille de bigots du Sud profond, évidemment c’est loin d’être le coup de foudre immédiat.
Et c’est là le deuxième atout de Whatever Works : sa méchanceté profonde, sa misanthropie avouée, son manque total de political correctness. Les juifs, les noirs, les jeunes, les femmes, les pédés, tout le monde y passe. Oui tout le monde subit la méchanceté Yellnikoff, aka Woody Allen.
En face, l’innocence pure, la naïveté, mais aussi l’optimisme de la jeunesse de Marie Anne Celestine feront un utile contrepoids…
Après une heure trente de théâtre de boulevard – car c’est de cela qu’il s’agit, avec arrivées impromptues, manigances maternelles et ménage à trois -, tout ce petit monde sera réuni pour le Nouvel An, comme dans tout bon feelgood movie, contrairement aux prédictions Yelnikoviennes…
Ce n’est pas très bien joué, pas très bien filmé, mais c’est aussi rafraîchissant qu’un coca, après deux heures de marche exténuantes dans l’East Side…