Il existe trois sortes de films des frères Coen : les chefs-d’œuvres (Fargo, A Serious Man, O’Brother), les coups de génie (Big Lebowski, No Country for Old Men, Burn After Reading, Miller’s Crossing), et les ouais, bon ben comment dire (The Barber, Barton Fink, Le Grand Saut). Tout simplement, il n’y a pas de mauvais Coen : tout ce qu’ils proposent est impeccablement filmé, décoré, dialogué, interprété. Ces gars-là sont les champions du Contrôle Qualité, et aucun mauvais film ne sort de la chaîne de montage de Minneapolis. Mais bon, ils sont capables quand même de réaliser des films inintéressants, et True Grit est de ceux-là.
C’est quoi, ce film ? Une longue balade ennuyeuse dans les paysages de l’Oklahoma, à la fois magnifiques et en même temps étrangement délavés, comme si on avait voulu ôter leurs couleurs de carte postale ? Une métaphore sur le temps qui passe ? Un hommage à l’Ouest et à ses héros sauvages ? Un hommage au western, tout simplement ? Le Professore penche pour la dernière solution. Joel et Ethan Coen ont adoré le True Grit originel, 100 Dollars pour un Shérif, un film de 1969 d’Henry Hathaway avec John Wayne, et ils ont rêvé de le refaire. Bon ben voilà c’est fait…
Ce qui menace en fait les Coen, c’est la Woodenallisation Clinteastwoodique de leur œuvre : que chaque film sorte comme « Le Dernier Chef D’Œuvre Des Frères Coen ». C’est peu ou prou ce qui s’est passé avec True Grit, emballant une presse acquise d’avance, dithyrambique et unanime (sauf – et c’est assez remarquable pour être noté – la presse « intello » (Les Cahiers du Cinéma, Libé, les Inrocks…)
Pour ma part, j’aurais mieux fait d’écouter les CineFasters : Notre Agent au Kremlin, ou King of Cote, qui m’avait alerté sur la « pasmalitude » du film… Comme le disait un des deux frangins : « On fait un peu trop de films en ce moment… »
Ben oui, on est d’accord.
PS Les américains sont des gens étranges : boudant habituellement les productions coeniennes (petits budgets, succès d’estime), ils ont couronné True Grit (170M€ de recettes)