mercredi 11 mai 2011


L’Aigle de la Neuvième Légion
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Un film de rêve. J’en ai rêvé, Kevin Macdonald (Le Dernier Roi d’Ecosse) l’a fait : un peplum ré-a-liste ! Dès le départ, Le Professore est aux anges. Tout colle : la boue sur le casque du centurion, l’angoisse dans les yeux des soldats, le blé qui ondule dans le vent : L’Aigle de la Neuvième Légion réussit là où un paquasse de films a échoué : le film subtil sur l’antiquité. Pas une bouillie scénaristique façon Gladiator, pas de clichés américano-américains façon Troie, et pas un peplum-baston version 300. Non, L’Aigle de la Neuvième Légion est un film ambitieux.

Le pitch… Marcus Aquila, centurion romain, s’est engagé là où personne ne veut aller : en Bretonnie, sous la menace permanente des tribus celtes, qui, près du Mur d’Hadrien, lancent des raids contre l’envahisseur romain. Mais Marcus Aquila a une cause, secrète : restaurer l’honneur perdu de son père, qui a combattu ici, et a disparu, avec le symbole de la Neuvième Légion : un Aigle en or massif.

Marcus Aquila va se faire aider par Esca, un jeune esclave qu’il a sauvé des arènes. Mais celui-ci le déteste, car il appartient aussi à cette histoire : sa famille a été massacrée par ces mêmes romains. Lié par son code de l’honneur, il accepte néanmoins de le servir : les voilà tous les deux en quête de l’Aigle.

Pendant une heure, le film est formidable. Formidable, d’érudition, de subtilité, et d’ambition. Formidables par ses acteurs, Channing Tatum, Jamie Bell et notre Tahar Rahim ! L’Aigle de la Neuvième Légion reste évidemment un film d’aventure, mais qui pose, comme un futur classique, des questions essentielles : qui est le Civilisé ? Qui est le Barbare ? Qui est le Maître ? Qui est l’Esclave ? Car en terre étrangère, qui connaît les chemins, la langue, distingue l’ami de l’ennemi ? Tout cela évidemment, entre en résonance avec quelques thématiques modernes : un soldat US perdu dans les montagnes afghanes avec son guide pourrait faire l’affaire…

Mais malheureusement, le film est adapte d’un livre, pour ado, parait-il. Et voila que petit à petit, on sent que le livre tire son adaptation cinématographique vers le bas. L’intrigue devient de plus en plus prévisible, les clichés de plus en plus gros, et la conclusion, très décevante.

Décevante ? Après tous les compliments que l’on vient d’en faire ? C’est que tout simplement, on ne pardonne rien à un film ambitieux, mais tout à un film modeste.

Prenez Le Roi Arthur, par exemple : tout le contraire de L’Aigle de la Neuvième Légion : gros budget, Jerry Bruckheimer aux commandes, Clive Owen beau comme un dieu, Kheira Knightley à moitié à poil (mais maquillée en bleu), des dialogues qui tuent, de la grosse baston. Dès que Le Roi Arthur va faire preuve d’un tout petit peu de subtilité (irruption du christianisme, fin des romains comme des celtes…), on applaudit à deux mains. Nous voilà tout content de voir un pour cent d’intelligence offerte gratuitement dans un Blockbuster.

À l’inverse, un film ambitieux comme L’Aigle de la Neuvième Légion, ou Battlestar Galactica (voir plus bas) qui déraille cinq minutes avant la fin, et nous voila déçus comme des pierres : c’est la malédiction du CineFaster.

Que ces quelques mots amers ne vous découragent pas ; comme je l’expliquerais prochainement devant vos yeux ébahis, en démontrant le fameux « Théorème de Rabillon » : vous n’avez pas le choix.

Et vous ne regretterez vos dix euros.