J’ai honte.
Par fainéantise, je ne suis pas allé voir The Box en salle. The Box, oui, le film de Richard Kelly, Mr Donnie Darko himself.
A l’opposé de beaucoup de cinéastes aujourd’hui, Richard Kelly a confiance dans le cinéma. Mieux, il croit en notre capacité à rêver, il a confiance dans l’intelligence du spectateur. C’est pour cela que dans ses films, il laisse des trous partout : dans les dialogues, les situations. Et nous laisse, pauvre spectateur déjà au bord de l’apoplexie, trouver des réponses par nous-mêmes.
Car The Box fait peur, très peur même, de cette peur purement intellectuelle, cet effroi qui troue le cœur, au milieu d’une nouvelle de Lovecraft ou à la conclusion d’un épisode de La Quatrième Dimension, influence évidente de The Box. D’ailleurs, Richard Matheson, scénariste de certains épisodes de la série, mais aussi du Duel de Spielberg, de L’Homme qui rétrécit ou de Je suis une Légende, est l’auteur ici de la nouvelle-titre Button, Button qui sert de base au scénario de The Box.
Mais qu’y a-t-il dans cette fameuse boîte ? un bouton justement. Appuyez dessus, et vous toucherez un million de dollars… et quelqu’un que vous ne connaissez pas mourra, quelque part dans le monde… Vous avez 24h pour vous décider, demain, la boîte sera proposée à quelqu’un d’autre. Et à qui la propose-t-on, cette boite ? A un couple de Monsieur-tout-le-monde : Norma Lewis, prof de philo spécialiste de Jean-Paul Sartre (Cameron Diaz) et Arthur, son mari, ingénieur à la NASA (James Marsden). Evidemment, on peut donner toutes sortes de réponses à ce dilemme, en utilisant l’existentialisme (que faire de ma vie avec cette boîte ?) ou le retro-engineering (qu’est-ce qu’il y a dans cette boîte ?). A l’évidence, rien. La réponse et en nous. La réponse, c’est nous.
Quand on est un gentil petit couple qui vit au-dessus de ses moyens, peut-on résister à un million de dollars ? Sûrement pas. Ce qu’il adviendra d’eux, et à quoi sert The Box, c’est évidemment le sujet du film, mais pas son principal attrait.
Non, la force du film, c’est son univers, c’est son ambiance : nous sommes en 1976, la sonde Viking vient de se poser sur Mars, et Richard Kelly joue de cela, dans ce monde familier, mais étrange également, nappée d’une photo féérique et d’une musique délicieusement hitchcockienne. Un mélange de Mulholland Drive et de 2001. Tout à l’air normal, mais tout est bizarre : l’alignement des flûtes de champagne, le miroir du bar, la piscine du motel, le Père Noël…
On pourrait invoquer David Lynch, mais on voit tout de suite que Kelly a son propre univers. Qui est capable, sinon lui, de rendre plausible la présence d’un lapin géant et monstrueux dans Donnie Darko ? Sa production est rare (3 films : Donnie Darko, The Box et le maudit Southland Tales) : Richard Kelly est donc précieux.
On va donc chercher l’œuvre maudite… Et on s’efforcera de ne pas rater le prochain Kelly… En salles !