samedi 6 octobre 2012


Rock au cinéma, part two
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

J’ai oublié un film d’importance l’autre jour, en fustigeant l’impossibilité de filmer le rock. Il y a bien sûr les documentaires : Gimme Shelter, des frères Maysles, 24 hour party People de Michael Winterbottom, mais je voudrais parler ici de Jean-Luc Godard et de son One+One (consacré aux Rolling Stones au sommet de leur talent). En l’occurrence, la meilleure réponse à la scène minable de Ray.

Si vous voulez voir comment on écrit une chanson, jetez-vous sur One+One*, le chef d’œuvre sur la question. 1968. Les Rolling Stones pataugent dans la semoule pendant quatre jours, à essayer de faire quelque chose d’une chanson en 3 accords (mi-ré-la). Pendant des heures, le malheureux Brian Jones aligne ces accords sur une guitare acoustique, et peu à peu la guitare disparaît, comme Brian, qui sera viré quelques semaines plus tard. Bill Wyman, qui commence à en avoir un peu ras le bol de ce blues en 12 mesures, se met à jouer de la samba. Les filles, elles, chantent oooh-ooh derrière la vitre. Quant à Jagger, il peine à trouver des paroles en s’inspirant du Maitre et Marguerite de Bougalkov, opportunément prêté par Marianne Faithful.

Mais petit à petit, heure après heure, tandis que Brian Jones disparait littéralement de l’image, la samba diabolique de Jagger/Richards s’enflamme. Et Mick, qui chante très mal au début, commence à entrer dans la transe.

Et voilà, la chanson est née. Pas en 2’40, sur un lit de roses, entouré de mignonnes petites choristes. Non, dans le sang, la sueur, et les larmes.

*Godard réeditera le coup avec Soigne ta Droite : les Rita Mitsouko composent No Comprendo dans leur salle de bains. Tout aussi passionnant, malgré mon pitch ironique.