On le sentait arriver mais on a espéré jusqu’au bout qu’il n’en fut rien. Mais si, Tunnel décline, Tunnel se plante. La faute à ces éternelles facilités scénaristiques qui tuent les meilleures intentions.
Quelles sont-elles, ces intentions ? Dépeindre la zone grise de Sangatte-Folkestone, symbole du déclin de l’Europe ? Ses migrants sans papiers, sa prostitution, ses trafics ? Ses flics, ses voyous, et ses saints ? Y superposer un tueur vengeur – façon John Doe de Seven – qui fait la leçon à tout le monde ?
Excellente idée en vérité, qu’il faut tenir jusqu’au bout.
Mais après un début fracassant, Tunnel s’essoufle.
Première erreur : l’assassin (The Truth Terrorist) est trop fort.
Il sait tout, a accès à tout. Il dispose de beaucoup de matériel (sites internet, explosifs indétectables, uniformes divers, planques à foison) ; il est toujours là quand il le faut. Certes, on comprend cette nécessité de multiplier les rebondissements mais un peu de réalisme de temps en temps ne fait de mal. C’est le syndrome House of Cards.
Deuxième erreur : On ne prend pas le temps d’installer les personnages ou les intrigues
C’est tout le plaisir de la série : on a tout le temps du monde. Pourquoi bâcler une histoire de vengeance adultérine en un seul épisode ? Pourquoi amener des personnages d’épiciers maghrébins venus de nulle part et les abandonner presque immédiatement ? Pourquoi lancer quelques milliardaires mystérieux et les oublier ensuite ? Tunnel lance ses filets, mais rejette immédiatement ses poissons à la mer. C’est le syndrome Un Village Français.
Troisième erreur : Tunnel recule devant l’obstacle
Tunnel est glauque, mais il y a un moment où la série sent qu’elle pourrait aller trop loin ; c’est pourtant là que ça devient intéressant. Malgré son courage politique affiché dans le pilote, Tunnel se déballonne quand il s’agit de tuer un flic ou gentil. Seuls quelques méchants y passent. C’est le syndrome Homeland.
Il nous reste encore beaucoup à apprendre des (bonnes) séries US.