Caché derrière un slogan trop vendeur pour être honnête (« ce film mériterait de figurer en bonne place aux côtés de 2001, l’Odyssée de l’Espace », Moonwalk One est toutefois une pépite de documentaire qui sort au cœur de l’été.
Mais la publicité, pour peu qu’on s’y attarde, est rarement mensongère ; elle révèle simplement les fantasmes de l’annonceur. Ici, l’annonceur, c’est Theo Kamecke, le réalisateur, qui, en 1970 – deux ans après le choc 2001 – rêve de faire son Kubrick.
En ce temps-là, le rêve spatial est à son apogée, 2001 a cartonné en salles, et chacun est conscient du moment historique, philosophique, ontologique, que l’humanité se prépare à vivre. Pour reprendre une expression célèbre, l’Homme vivait au fond d’un puits, lui-même perdu dans un grand jardin. Ce 20 juillet 1969, l’homme pose enfin le pied sur la margelle du puits et peut contempler son jardin.
Pour raconter cette histoire, Theo Kamecke pioche sans vergogne dans la structure de 2001, l’Odyssée de l’Espace: intro à Stonehenge et visions mystiques de l’Univers, le tout recouvert de nappes musicales façon Pink Floyd, période acide*. Vu comme ça, Moonwalk One est très daté, mal mixé, et pas très regardable. Mais pourtant, si l’on fait preuve d’un peu de clémence, le documentaire révèle peu à peu toutes ses pépites. Une excellente narration du voyage et des premiers pas sur la lune (dont un certain nombre d’images inédites) et une bonne évocation de l’époque. Derrière cette forme soudaine de consensus mondial, certaines voix discordantes s’expriment néanmoins, notamment sur le coût de l’expédition alors que des peuples meurent de faim au Tiers Monde.
Si l’on ne s’attache donc pas trop au folklore mystique et à la musique, Moonwalk One est un incontournable.
* On rappellera que le groupe de Cambridge avait été pressenti pour composer la musique de 2001, avant qu’un coup de génie ne fasse changer Kubrick d’avis. Le cinéaste cherchait des idées pour la fameuse scène de la station orbitale. Il demande alors à son monteur de « coller une musique sur son premier montage, n’importe quoi, pour voir ce que ça donne », en attendant d’avoir celle de Pink Floyd. Ce n’importe quoi, c’est Le Beau Danube Bleu. Enthousiasmé, Kubrick renonce à l’idée d’une musique originale et se met en recherche de musique classique et contemporaine (Strauss, Ligeti, Khachaturian) pour la musique de 2001. Il continuera à faire de même pour ses films suivants (Beethoven pour Orange Mécanique, Schubert pour Barry Lyndon, Penderecki pour Shining). Et il ne fera appel que ponctuellement à des compositeurs comme Wendy Carlos pour réorchestrer des parties de Shining et Orange Mécanique, ou comme sa fille, Abigail Mead, pour de la musique de complément sur Full Metal Jacket).