vendredi 22 décembre 2017


Touchez pas au Grisbi
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Quand au bout de cinq minutes, Jeanne Moreau sniffe de la cocaïne dans une Aronde avec Jean Gabin, on comprend qu’on n’est pas dans le cinéma « qualité française » honni de la Nouvelle Vague. Jacques Becker est aux commandes, l’homme de Casque d’Or et du Trou, et le scénariste n’est autre qu’Albert Simonin, le roi de l’argot du milieu, qui donnera aussi bien Mélodie en Sous-Sol que les Tontons Flingueurs et son terminus des prétentieux. Mais ici, c’est la veine sérieuse de Simonin.

Touchez pas au Grisbi, c’est une sorte de drame antique, un Heat avant la lettre, c’est à dire le code du Bushido appliqué au Milieu. Un film sur l’amitié, sur l’âge qui passe, sur un certain sens de l’honneur et de la fidélité. L’intrigue est simplissime, ce n’est pas toujours très bien joué ni très bien filmé. Gabin, qui a l’âge du rôle (50 ans) entre dans sa phase de cabotinage dont il ne sortira plus…

Mais pourtant, Touchez pas au Grisbi, c’est admirable. Après un casse censé les mettre à l’abri (le fameux « dernier coup »), Max (Gabin) et Riton (René Dary) ont caché les lingots dérobés à Orly. Ils s’apprêtent à les refourguer et partir en retraite, quand ils sont balancés par la belle Josy (la débutante Jeanne Moreau) à Angelo, son nouveau protecteur (Lino Ventura, autre débutant du film). Angelo prend Riton en otage et exige qu’on lui livre l’or. Max, le plus solide des deux voyous, ne peut pourtant se résoudre à abandonner son ami Riton. Il s’engage à livrer le pactole.

Mais tout finira mal, évidemment, car l’amitié ne fait pas bon ménage avec les affaires. Pour un film des années 50, le film est assez étonnant : drogue, violence, nudité. Tout se passe dans le Milieu, comme le remarque Jean Tulard*, et le reste du monde (les flics, les caves) fait seulement décor. C’est à la fois la fin du Milieu mais aussi la fin d’un certain cinéma, pour le meilleur (la Nouvelle Vague) et le pire (la critique issue de la Nouvelle Vague, qui castrera le cinéma français jusqu’à Luc Besson) …

* Guide des Films de A à Z, de Jean Tulard

NB le film repasse sur Arte ce soir