Avant de voir Apollo 11 – chef-d’œuvre de documentaire sur la conquête spatiale – au Pathé La villette, on doit subir une poignée génériques IMAX, sur le thème « préparez-vous au grand spectacle », avec vibration du siège, musique assourdissante, etc.
Cela évoque immédiatement Le Royaume de leurs Rêves. Dans la somme de Neal Gabler sur les premiers pas de l’industrie, l’auteur raconte comment cette attraction de foire devient, au début du vingtième siècle, un passe-temps mondial et bientôt un art. A l’époque, on ne diffuse que quelques images à grand spectacle (la Tour Eiffel ou les Chutes du Niagara) ; la foule donne ses 5 cents, s’esbaudit et repart cinq minutes plus tard vers l’attraction suivante, la Femme à Barbe ou le stand de pommes d’amour.
C’est peut-être ce qu’est en train de (re)devenir le cinéma, en tout cas le cinéma américain, qui propose de plus en plus des films spectaculaires peu regardables (dans tous les sens du terme) en dehors d’une salle de cinéma équipé d’écrans géants et de son surround.
C’est exactement ce qui s’est passé dans les années 50, quand la télé s’est généralisée aux Etats-Unis. Le phénomène a obligé l’industrie à un certain nombre de révolutions technologiques : la généralisation de la couleur, la création d’un format non adapté au téléviseur (le Cinémascope), mais l’a aussi amené à revoir ses contenus. A la place des drames intimes, des polars glauques, les genres à grand spectacle se sont développés : le western et le péplum*.
Aujourd’hui, ce sont les films de superhéros qui tiennent le haut de l’affiche, et le péplum a été remplacé par la Fantasy. Un autre genre suit une croissance exponentielle : le film d’horreur. Là aussi, un genre de films qui ne fonctionne pas devant sa télé**, mais où l’expérience de la salle, où l’on est prisonnier de son siège, produit l’effet maximum…
* Même s’ils préexistaient déjà (Intolérance, Tom Mix, etc.)
**ou alors en mode second degré, avec pop-corn et pizza.