C’est la bonne nouvelle du jour : Ridley Scott est encore capable de faire un bon film. Sur la base d’un casting improbable : Ben Affleck et Matt Damon, les working class heroes de Boston, en chevaliers français du XIVe siècle, écrit et produit par eux. Mais c’est oublier que ce sont aussi de bons scénaristes (Will Hunting, Gone Baby Gone, The Town, Promised Land).
L’argument ici est relativement simple, et évidemment basé sur des faits réels. On n’ira pas questionner, de toute façon, la véracité d’une histoire qui a sept cent ans. Jean de Carrouges (Matt Damon), est un vaillant chevalier, loyal, au visage couturé par les batailles de la Guerre de Cent Ans. Son meilleur ami, Jacques le Gris (Adam Driver) est toujours à ses côtés. Carrouges finit par trouver une épouse, la ravissante Marguerite (Jodie Comer), fille d’un seigneur honni pour avoir collaboré avec les Anglais.
Mais voilà que Marguerite est violée, et refuse de se taire. Pour venger son honneur, son mari demande l’ordalie, c’est à dire demander à Dieu de décider qui dit la vérité, dans un duel à mort : sa femme ou son violeur.
Le génie de Ridley Scott est double. D’une part, ne jamais franchir la ligne rouge du réalisme de ce #metoo médiéval. Ensuite, ne pas chercher le chef-d’œuvre. Scott se contente de son programme de divertissement : combats sanglants et reconstitution soignée*. En gardant ce bon niveau d’ambition, Le Dernier Duel s’approche du film parfait, qui avance vite sans pour autant perdre le spectateur. Son dispositif panoptique (la version de la femme violée, de son violeur et du mari) passe crème. Les acteurs, qui pourraient aisément sombrer dans le ridicule, tiennent la rampe, jusques et y compris Ben Affleck, qui propose dans cet univers hypocrite bardé d’honneur et de loyauté, un judicieux contrepoint, jouisseur et cynique…
A voir absolument.
* Même si le médiéviste acharné peut découvrir quelques incongruités, comme par exemple ce vitrail baroque au milieu d’une église médiévale.