vendredi 2 août 2024


Ripley
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]

Il y a des gens qui croient encore dans le cinéma : Steven Zaillian en fait partie. Adapter Ripley, le livre de Patricia Highsmith, c’est prendre le risque de la comparaison avec un grand film, Plein Soleil, avec Delon et Ronet au sommet de leur forme. Le projet Netflix ne fait pas dans la dentelle, huit heures d’un noir et blanc somptueux, avec des acteurs peu connus (Andrew Scott (Fleabag), Johnny Flynn (Stardust), Dakota Fanning (The Runaways)). Pourtant, c’est une réussite indiscutable.

C’est comme si Steven Zaillian avait décidé d’appliquer le programme d’Alfred Hitchcock dans son intégralité.

1. Tu ne feras pas d’une star un méchant : en castant Andrew Scott, acteur peu connu, gentil prêtre de Fleabag, mais aussi Moriarty de Sherlock, il a trouvé un acteur en apparence gentil, qui engendre dès le départ de l’empathie, mais dont le moindre sourire de psychopathe vous glace le sang

5. Tu créeras des décors qui auront l’air vrais : la reconstitution de l’Italie des années 60, les vêtements, les tickets de train, les journaux, tout sonne juste…

6. Tu ne confondras pas surprise et suspense : Pendant huit heures, Steven Zaillian ménage quelques surprises (d’une rare violence) mais il instaure surtout un suspens continu. Le protagoniste accumule des traces qui viennent contredire ses alibis, et Zaillian les filme consciencieusement : le cendrier, les reçus de trains, les registres d’hôtel, etc. Avec tout ça, il devrait se faire prendre. Mais cela mène à un paradoxe bien connu du cinéma : moralement, le spectateur veut que Ripley se fasse arrêter, mais il craint sans arrêt qu’il ne le soit.

9. Tu supprimeras les dialogues, souvent inutiles : Il y a une grande économie de moyens de ce côté-là dans Ripley. Ceux qui parlent énoncent souvent des bêtises sans le savoir (le père, le privé…) ; Greenleaf, riche dilettante, reste emmuré dans son personnage qui croit maitriser le prolo Ripley, et Marge, tellement convaincue d’avoir été rejetée, finit par croire Ripley quelle soupçonne pourtant depuis le début. Tout passe par des silences, des regards, bref, du cinéma…

Dans ce huis clos qui accumule les labyrinthes (escaliers, ruelles, …), où l’Océan n’est qu’un lieu sinistre où se noue le drame, le spectateur est amener à contempler le haut et le bas et de la pyramide, comme en témoigne les multiples plongées-contre plongées*. Comme une démonstration visuelle de l’angoisse sourde qui noue du Sisyphe-Ripley, qui espère atteindre l’Olympe mais craint en permanence de retomber aux enfers…

* copyright Maître Belphegues




jeudi 1 août 2024


Victoria
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Bon ben voilà, on sait à quel emploi – comme on dit chez les professionnels de la Profession – on peut affecter Virginie Efira : la Comédie ! C’est là que la franco-belge est convaincante. Tout en retenue, et pourtant hilarante. On n’était pas convaincu par la Sibyl de Sibyl ni la Benedetta de Benedetta. Le sérieux ne te va pas au teint, Virginie ! Justine Thiriet, dont on fait la filmographie à l’envers (bientôt La Bataille de Solférino), révèle aussi un talent pour la comédie, peu décelable chez la furiosa antimacroniste.  

Victoria, c’est l’histoire d’une avocate à la ramasse qui gère ses deux gamins, ses amants idiots et son ex, écrivain-blogueur foutraque. Voilà que surgit Vincent, un client séduisant (et séducteur, le toujours excellent Melville Poupaud) accusé d’avoir poignardé sa chérie (une bimbo folle furieuse) à un mariage auquel assistait, justement, Victoria.

Le beau gosse nie, mais il est lui aussi complètement barré, et contre toute logique déontologique, Victoria accepte de le défendre. Surgit alors une aide inattendue, en la personne de Sam, (Vincent Lacoste, impérial) en assistant-baby sitter éperdu d’amour pour sa MILF de patronne.  

Tout cela est mené tambour battant avec un scenario impeccable, qui ne cherche ni le gros gag ni la punchline qui tache, et se permet néanmoins d’amener une touche sentimentale sur la fin.

Du grand art.

Madame Triet, de grâce, revenez faire un tour en comédie !