dimanche 22 septembre 2024


Succès artistique, succès commercial…
posté par Professor Ludovico dans [ Hollywood Gossip -Le Professor a toujours quelque chose à dire... -Les gens ]

C’est la phrase du jour : « Le succès artistique est délibéré, le succès commercial est accidentel ». Attribué à Herbert Ross, bon faiseur de Hollywood mais surtout réalisateur du très bon Potins de Femmes (Steel Magnolias), qui l’aurait fait broder sur un coussin.

Quoi de mieux pour résumer l’industrie du prototype qu’est Hollywood ? Pour être un artiste, il faut le vouloir. Vouloir se battre pour ses idées, lutter contre le système qui veut appliquer des formules pour obtenir un succès à tout prix, et qui coûte le moins cher possible. Si vous arrivez à survivre dans cette fosse aux requins, vous réussirez artistiquement, quitte à ce que le film soit un bide…

Mais obtenir un succès commercial à tous les coups, c’est très difficile. On le voit avec les franchises, capables d’échouer alors que toutes les chances ont été mises de leur côté : budget, artistes, techniciens, et licence solide…

Une anecdote, parmi mille autres, pioché dans l’excellent « Il y a bien longtemps, dans une salle de montage lointaine, très lointaine », le livre de souvenirs de Paul Hirsch, prêté par le Professeur Pichard. Paul Hirsch, le monteur attitré de Brian de Palma mais aussi de La Guerre des Etoiles, La Folle Journée de Ferris Buller et de Mission Impossible




lundi 16 septembre 2024


Emilia Pérez
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

On avait quelques doutes sur le génie Jacques Audiard. Les génies ne sont pas éternels, et Les Olympiades montraient quelques signes d’essoufflement, de vieillissement, chez l’un de nos plus grands cinéastes.

Le sujet d’Emilia Pérez n’était pas fait pour rassurer : un narco mexicain veut devenir une femme pour faire le bien sur la terre : on avait connu chez Audiard sujet plus réaliste.  

Mais bon, nous voilà assis au fond du MK2 Bastille Beaumarchais, pour profiter pleinement, non pas de la photographie sublime de Paul Guilhaume, mais des 55 éclairages d’évacuation, quand Zoe Saldaña se met à chanter. Et à danser.

Et là, tout bascule.

Sur un tel sujet, un film sérieux (comme à l’habitude d’Audiard), aurait été abscons, irréaliste, insupportable de naïveté politique. Mais en comédie musicale, Emilia Pérez passe dans une autre dimension, celle de la fable, du conte moral.

Porté avec une grande fluidité par trois actrices d’exception (Zoe Saldaña, Karla Sofía Gascón et Selena Gomez) le film explose le genre. Pas le genre masculin, mais le genre cinématographique. Le film n’est pas une apologie de la transidentité, mais une métaphore du changement, une histoire de rédemption. Quelqu’un qui décide de changer tout pour devenir enfin, peut-être pas quelqu’un de bien, mais quelqu’un de mieux.

Audiard ne perd pas le réalisme en route ; tout le reste sonne juste : le Mexique, les narcos, le polar. L’intrigue, abracadabrantesque, retombe sur ses pieds dans un final impeccable.

Le génie français est de retour.




mercredi 11 septembre 2024


La Veuve Couderc
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

La mort d’Alain Delon permet de rattraper des films, La Veuve Couderc par exemple. Bon, à vrai dire, le Professore Ludovico a longtemps confondu ce film avec Les Granges Brûlées, et La Horse.

La Veuve Couderc est basé sur un roman de Simenon dont le pitch est simple mais démontre qu’en 1h30 – contrairement à ce qu’on dit partout – on peut créer des personnages et les faire évoluer sans avoir besoin de six heures sur Netflix. Ici, la veuve en question (Signoret) vit chichement dans une ferme au bord d’un canal. Elle rencontre au début du film un beau mec (Alain Delon) qui cherche du travail. Ça tombe bien, elle en a, exploitant désormais seule la ferme de son mari (au grand dam de sa belle-sœur, l’éclusière, dont la fille, lolita déjà fille-mère, complète l’ensemble). Le drame est posé. Une femme vieillissante qui cherche un homme, qui va passer de sa protectrice à la nymphette.  

Comme on l’a dit précédemment, Delon ne joue pas très bien, et est peu crédible en costume de ville binant les champs de pommes de terre. Mais La Signoret est impériale comme à son habitude. Sa seule voix, emplie de tabac, de tristesse, et de colère tout à la fois, les larmes perlant au bord de ces yeux bleu acier suffisent à retourner n’importe quel spectateur.

C’est la Signoret post Casque d’Or que nous avons toujours connue, celles des années 70, de L’Aveu à Police Python 357. Et puis il y a Simenon, cette ambiance campagnarde, l’écluse, les bateaux, le bal, et le drame qui pointe. Et une conclusion/explication étonnante.

Ça suffit à faire film.




mardi 10 septembre 2024


Alien : Romulus
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Il pleuvait sur la vallée. Ridley Scott entra en bougonnant dans la salle de réunion, au dernier étage des 20th Century Studios. Il savait déjà ce que les suits allaient lui dire :

Ridley, faut qu’on change notre fusil d’épaule, on se fait massacrer sur Sens Critique, et l’ayatollah Ludovico dit partout que tu as brûlé ta propre œuvre. On peut pas continuer comme ça…

Très bien, dit l’anglais, posant négligemment les clés de sa Bentley sur le dossier Alien : Romulus. On va leur donner ce qu’ils veulent. MAIS NE COMPTEZ PAS SUR MOI POUR DIRIGER CE FILM !!

– Tu as une idée à nous soumettre ?

– Prenez qui vous voulez, j’en ai rien à branler, mais il a pas intérêt à merder !

Fede Alvarez savait à quoi s’en tenir. Le film n’arrête donc pas de donner des gages au fanboy. Dès la première scène, Alvarez invoque Blade Runner, téléportant l’univers de Scott dans les colonies Weyland-Yutani. Six prolos, exploités par la mégacorpo, ont trouvé un plan pour se tirer de là. Dès qu’ils montent dans le vaisseau, la déco est à l’avenant : ordinateurs seventies, fumées et néon, décors sales et sombres. C’est parfait, et pas seulement parce que l’on respecte l’univers initial. L’important, c’est que les personnages agissent selon de véritables motivations, et non selon les caprices scénaristiques de Ridley « J’ai le melon » Scott (cf. Prometheus et Covenant).

Alien : Romulus est plein de bonnes idées, qui jouent avec le cadre, avec la mythologie Alien. On ne regrette pas sa soirée, comme on dit dans Papy fait de la Résistance. Il est juste dommage que Fede Alvarez se sente (ou soit ?) obligé de payer autant sa dette. La fin est longue, très convenue, copié/collé absolu d’Alien, premier du nom.

Il est facile de considérer que c’est le 2ème meilleur film, devant Aliens (très surcôté parce qu’il a inventé les Space Marines) et Alien3 (très surcôté parce qu’il s’agit d’un Fincher raté, mais d’un Fincher quand même. )

Alien : Romulus est plaisant, et ce n’est pas un massacre : c’est déjà beaucoup.




jeudi 5 septembre 2024


Alain Delon
posté par Professor Ludovico dans [ Les gens -Pour en finir avec ... ]

Alain Delon a disparu pendant l’été. A vrai dire, l’acteur avait disparu depuis longtemps. Les années 80, pour être précis, et pour fixer les choses, Le Choc ou Trois Hommes à Abattre.

Odieux connard mais bon acteur, beauté incandescente mais insupportable réac : comment évaluer sereinement la carrière de Delon ? Un artiste n’a pas besoin d’être quelqu’un de bien pour être d’extraordinaire ; c’est le cas de Chuck Berry, Mick Jagger, Bob Dylan, Stanley Kubrick, Philip K. Dick.

Delon ne peut être réduit à sa personnalité, mais ce n’était pas non plus un acteur gigantesque. Son œuvre est longue, il est tourné avec les plus grands (Visconti, Melville, Antonioni, etc.) Mais quels sont ses grands rôles ? Comme me l’avait un jour expliqué Mademoiselle K., il y a une différence entre acteur et comédien. Un comédien sait tout jouer, un acteur ne joue que lui-même. Par exemple, Delon*. CQFD.

Delon n’était pas De Niro ou Pacino, ni même Gabin, Trintigant ou Depardieu. Il ne pouvait pas tout jouer. On n’imagine pas Delon jouer un cuistot, un soldat traumatisé ou un autiste.

Delon jouait lui-même et le jouait très bien. Sa filmographie parle pour lui, et cela suffit.

* Elle me précisa immédiatement qu’elle était comédienne…




mercredi 4 septembre 2024


Les Pistolets en Plastique
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Pour on ne sait quelle raison, Les Pistolets en Plastique n’ont pas été chroniqués dans CineFast.

Grave oubli.  

Les Pistolets sont tombés dans le trou noir des chroniques jamais écrites. Ce phénomène étrange a pourtant été étudié depuis longtemps par le Professore Ludovico au Jet Propulsion Laboratory, à Pasadena comme chacun sait. La science démontre en effet qu’un mauvais film excite les particules critiques, et incite le CineFaster à démolir cette merde qui lui a fait perdre deux heures de sa vie. Au contraire, un bon film, a fortiori un film drôle, le laisse dans un tel état d’euphorie qu’il en oublie son devoir premier : informer. Car la mission de CineFast, s’il en est, est de pousser les gens à aller au cinéma pour voir les meilleurs films.  Les Pistolets en Plastique sont de ceux-là. Problème : le film de Jean-Christophe Meurisse est sorti en juin. Vous allez donc le chercher sur votre plate-forme préférée.

Du coup, de quoi s’agit-t-il ? Rien de moins qu’une parodie totalement barrée de l’affaire Dupont de Ligonnès, en particulier sur les détectives amateurs qui cherchent la solution. Jean-Christophe Meurisse aligne avec un talent rare une galerie de personnages tout aussi délirants (mais réalistes) : la voisine raciste, les flics incompétents, les mégères enquêtrices. Tout cela dans une ambiance à la Dupieux, ne reculant devant aucun gag, même les pires…

Mais tout cela est tellement bien fait (acteurs, dialogues, déco) que c’en est particulièrement réjouissant. Cela ne plaira pas à tout le monde – certains spectateurs ont quitté la séance – mais sans aucun doute que le goût sûr du CineFaster y trouvera son compte…