dimanche 5 janvier 2025


Jugement à Nuremberg
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Quel étrange film que voilà ! Trois heures pour évoquer le jugement fictif de quatre magistrats nazis*, après les grands procès de 1945 (Göring, Hess, Ribbentrop, etc.) Un film pédagogique, d’une ambiguïté folle.

Pendant ces trois heures, on va au gré des personnages passer d’un sentiment à l’autre. Stanley Kramer nous met dans la position de Spencer Tracy, le vieux grand-père qu’on a nommé Juge, parce qu’on ne sait pas trop quoi en faire. On écoutera comme lui le réquisitoire d’un procureur déchaîné (Richard Widmark), bien décidé à châtier le plus sévèrement possible ces hauts fonctionnaires d’Hitler. Puis on basculera vers le camp adverse, au travers du personnage de Marlene Dietrich, veuve d’un officier allemand. Elle tentera de montrer que tous ses semblables ne sont pas des monstres. Puis par l’avocat, le tout jeune et brillant Maximilian Schell**, qui dénoncera l’hypocrisie de ce procès, alors que d’autres terreurs sont là : Hiroshima et Nagasaki, la ségrégation raciale aux Etats-Unis, le communisme qui s’étend à l’est. Devant l’aveuglement des alliés devant Hitler, n’est-ce pas toute l’humanité qui devrait être jugée ?

En coulisses, des magouilles politiques viennent troubler le procès : le blocus de Berlin fait pencher les autorités américaines vers plus de mansuétude envers les allemands, qui se serviront bientôt de glacis face aux soviétiques.

C’est oublier cet étrange accusé, Burt Lancaster, maquillé en vieil homme. Voilà une star qui n’a pas une ligne de dialogue pendant deux heures. Pourquoi ? C’est le génie de Jugement à Nuremberg : c’est toujours le dernier qui parle qui a raison. Et Ernst Janning (Lancaster) va bientôt parler…

À la fin, le film tirera une conclusion à la fois morale et douce-amère. La Loi, oui. La Justice, peut-être… La vérité, qui sait ?

* fictifs, mais basé sur un procès réel
** qui gagnera l’Oscar pour cette performance