Un film réussi, c’est difficile. Il y a des films qui frôlent le chef d’œuvre, et, qui à vingt centimètres du but, ratent l’objectif. C’est le cas de L’Affaire Rachel Singer.
Problème : expliquer l’échec du film serait en dévoiler tout le charme. Car L’Affaire Rachel Singer est un très bon film d’espionnage, comme il y en a si peu cinéma : réaliste, glauque, psychologique. John Le Carré en 35mm.
On ne dira rien, donc, sauf ce qui est déjà dans la bande-annonce : l’histoire de trois agents du Mossad chargé d’enlever le chirurgien de Birkenau pour le faire juger en Israël. On suit deux époques : Berlin Est 1965, et Israël 1997, quand la fille d’un des agents publie avec succès un livre sur cette aventure.
L’Affaire Rachel Singer est un très beau film sur la vérité et le mensonge, cette zone grise de l’espionnage et de la politique internationale. Cette zone si indispensable qui permet d’éviter la guerre, et qui a son lot d’exploits méconnus et de morts secrètes.
L’Affaire Rachel Singer aurait été une vraie réussite si elle était restée là : réalisation millimétrée, acteurs excellents, dont la révélation Tree of Life Jessica Chastain. Mais le film de John Madden (Shakespeare in Love) a beau être un remake de film israélien (The Debt), se passer en Israël et en Europe, c’est un film indubitablement américain. Avec cette obsession toute américaine de la vérité. La Vérité avec un grand V. Comme on le voit avec une affaire récente, aux États Unis, il vaut mieux violenter que mentir. The truth, nothing but the truth, so help me god.
Dès lors, L’Affaire Rachel Singer ne pouvait finir autrement que cette fin programmée. En deux minutes, John Madden chasse toute l’excitante ambigüité du film pour nous assnéer cette très morale « Vérité ».
Il reste un film tout à fait visible, mais plus l’indispensable chef d’œuvre qu’il aurait pu être.