Où est passé Denys Arcand ? Le cinéaste inspiré de Jésus de Montréal, le chroniqueur du Déclin de L’empire Américain, le seul, à mon sens, capable de mélanger discours sérieux sur le choc des civilisations et blagues de cul, sombre à pic dans L’Age des Ténèbres.
Il y a sûrement beaucoup d’inconscient dans ce dernier film, et on sent que le héros n’est autre que le double plus jeune de Denys Arcand. Ce héros est mal marié, entouré d’enfants débiles, travaille dans les services sociaux dans un Québec, qui, dans dans un futur proche, est enfin libre. Ces services sociaux sont impuissants, tout comme notre héros, qui n’a pas baisé depuis 18 mois ; Ce qui ne l’empêche pas de fantasmer : il rêve de Diane Kruger, star hollywoodienne, Emma de Caunes (journaliste), ou encore sa collègue lesbienne ou sa chef SM. Ces fantasmes sont censés compenser les lacunes de son épouse, une « vraie salope » : elle refuse de cuisiner, se consacre à son job, ne s’occupe pas de ses enfants (sic !).
On sent derrière le vieux réac qui pointe, pire, le vieux réac de gauche, écolo et/ou communiste : les lacs sont pollués, les services publics sont en panne, les enfants jouent au jeu vidéo ou pire, commencent à avoir une vie sexuelle ! Tout ça sent le rance et le rassis. Le tout sans humour ou avec des gags digne du cinéma muet…
Mais le final reste le plus beau ; notre homme décide de tout lâcher, son job, sa femme, ses enfants, s’installe sur les bords du Saint Laurent, où il peut enfin abandonner ses fantasmes, est se mettre à cultiver son jardin ! Si ! Si ! Un petit clin d’œil à Voltaire qui en fait finalement un film très américain : la ville c’est le Mal, la campagne, c’est le Bien.
Apothéose finale sur l’ultime plan, une nature morte sur des pommes que Monsieur épluche désormais à la main. Le plan se métamorphose petit à petit en … peinture. Vu la métaphore ? Le Cinéma a détruit à l’Opéra (on en voit deux illustrations dans le film), la Photo détruit la Peinture. En concluant sur l’air de « c’était mieux avant », on sort de L’Age des Ténèbres définitivement achevé…
14 octobre 2007 à 21 h 57
[…] Tandis que le vaisseau Denys Arcand coule corps et biens dans L’âge des Ténèbres (j’y reviendrais), ne ratez pas* un film rare à la télévision : Jésus de Montréal. Le pitch : une troupe de théâtre reconstitue les derniers moments du Christ en vue d’un spectacle, éclairé par les dernières découvertes des historiens sur le premier siècle en Palestine. Mais petit à petit, l’acteur qui joue le christ se prend de plus en plus au rôle, et va vivre sa propre Passion, son propre martyre. […]