Vous l’aurez compris, à CineFast – et contrairement au cinéphile moyen -, on n’a rien contre le sport, et même les sports de masse, comme le football, si souvent boudés de nos amis intermittents du spectacle*.
Ceci n’est pas un blog sur le sport, mais rien n’empêche d’en parler, la saison étant propice. Après un article sur rugby, il est intéressant de s’interroger sur leur cinématographie (voulue), et leur dramaturgie (non voulue, certes, mais quelque peu dictée par les règles). Le plus étonnant, en ce moment c’est sûrement le tennis, et Roland Garros en particulier. Pourquoi ?
On s’y attache rarement, parce qu’il fait partie de la culture française, mais le tennis est un sport très bizarre. Système de score alambiqué (15, 30, 40 au lieu de 1-2-3), limites de terrain ésotériques (on utilise les marques du Double alors que l’épreuve n’est pas retransmise), et organisation pléthorique : 9 arbitres, 6 ramasseurs de balles pour 2 pauvres joueurs.
Et surtout, un des rares sport où l’on ne connaît pas la durée de jeu : 40 minutes ou 5 heures ? Pourquoi ? Parce qu’au tennis, il faut blesser au moins deux fois l’adversaire de suite pour gagner. Blesser, plutôt que marquer, car le tennis s’apparente en fait à une joute (on dit d’ailleurs tournoi). Nous voilà revenu, pour ce sport aristocratique, au moyen âge !
Un sport tout à fait élitiste où il faut se taire comme à l’opéra, ou l’on tend la serviette au joueur, qui ne se baisse jamais pour ramasser une balle, et au fair play absolu (on attend l’adversaire avant de servir) ; toute cette considération pour le sport le plus cruel qui soit, qui ressemble souvent plus à une mise à mort qu’à autre chose.
Les larmes de Federer, dimanche dernier à Roland Garros, participent de cette dramaturgie. Le noble chevalier Roger, portant haut les couleurs de sa gente dame, a corrigé le soudard Söderling, et, triomphant enfin dans la lice du Roi de France, pouvait enfin verser de nobles larmes.
*anecdote personnelle : lors d’un week-end à la campagne avec des copains travaillant dans l’Usine à Rêves, et voulant organiser un match de foot, je fus obligé de racler les fonds de tiroir pour organiser un semblant d’équipe. Il fallut les tirer un par un de leurs transats. L’un d’entre eux se fit énormément prier « Je ne sais pas jouer / J’aime pas le foot ». Après un « T’as pas le choix » énergique, et une heure de jeu, le gus en question se révèle Zidane de la journée. Au retour, je complimente l’épouse de Zizou sur les talents de son mari. Réaction mi-étonnée, mi-effarée : « TOI, TU JOUES AU FOOT ??? » Quelle déception, après tant d’années de mariage !
8 juillet 2013 à 10 h 45
[…] On l’a déjà dit ici, le sport est un formidable outil dramaturgique. Comme le cinéma, même si rien n’y est écrit à l’avance. […]