C’est parti pour les six derniers épisodes de notre série fétiche sur la France de 40, et, à vrai dire, il est temps que ça s’arrête. La série, qui était composée à 90% de réalisme historique et à 10% d’intrigues feuilletonnantes, est en train d’inverser cette proportion. Elle aligne les rebondissements les plus improbables, les uns après les autres, croyant que ça fait système. Au contraire, le spectateur, dépité, amoureux désabusé de sa maîtresse infidèle, décroche un peu plus à chaque scène.
Ainsi, Müller, dont personne ne nous a dit ce qu’il était devenu (les résumés à l’américaine, c’est vulgaire), revient dans la Grande Scène du IV. Une scène abrupte, absurde, incompréhensible, qu’on explique après (par un dialogue évidemment. Don’t show. Tell, it’s cheaper!) : Müller a été retourné, il est devenu un agent de l’OSS, comme beaucoup de nazis à cette période. N’importe qui, d’Asghar Farhadi à Hitchcock, de Marcel Carné à Steven Spielberg, vous aurait expliqué qu’il faut faire l’inverse, pour créer la suspense, pas la surprise.
Mais bon, UVF n’en est plus là. Elle préfère dépenser son argent dans un très bel effet spécial, qui mélange, d’un tour de caméra, passé et présent ; une façon de montrer que rien n’a changé sous la France de De Gaulle. Car il reste de belles choses dans Un Village Français ; les « corvées de bois » de la Guerre d’Algérie qui s’annoncent dans la scène des prisonniers allemands, les gaullistes qui ne s’embarrassent pas trop de principes, les communistes non plus. Il reste aussi quelques beaux personnages : Larcher, Schwartz, Servier, Bériot.
Dans quelques années, on oubliera les prestations calamiteuses des autres acteurs (peu aidés, la plupart du temps, par des situations scabreuses) pour retenir le courage ultime d’un Servier, la gouaille d’un Marchetti, l’assurance morale d’un Schwartz.
Car Un Village Français nous a beaucoup donné. Et s’il nous a un peu repris ces dernières années, le cadeau originel ne s’oublie pas.