Quand il ne restera plus sur terre qu’un seul cinéaste sérieux, Steve McQueen sera celui-là. Après un film quasi expérimental sur l’IRA (Hunger), un film sur l’addiction sexuelle (Shame), un film-chef d’œuvre sur l’esclavage (12 Years a Slave), McQueen tente le polar de genre. Mais pas n’importe quel polar, et pas n’importe quel genre. Les Veuves est un polar féministe, afro-américain, qui aurait pour modèle Heat, Usual Suspects, The Town, et qui aurait condensé Sur Ecoute en deux heures. Comme David Simon, Steve McQueen découpe la ville de Chicago en tranches : les politicards, les églises, les riches et les pauvres, les blancs et les noirs. Les hommes et les femmes. Et les gangsters.
Après avoir fait l’artiste, McQueen fait l’auteur. Le propos, l’intention, sont plus importants que l’intrigue. L’argument est assez faible : des veuves de gangsters qui n’y connaissent rien sont obligées de monter un braquage. Mais là n’est pas le propos. Les Veuves est une variation sur le #metoo et #blacklivesmatter, mais une variation subtile, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Les bons ne sont pas très gentils, et les méchants sont partout. Même les femmes, même les noirs.
Steve McQueen filme tout cela au même niveau, le suspense musclé et la critique sociale longitudinale. Il est aidé, c’est vrai, d’un casting aux petits oignions sorti de la cuisse de la meilleure télévision (Orange is the New Black, The Wire, A la maison Blanche, True Detective). Et le toujours génial Robert Duvall.
Avec ça, difficile d’échouer.