mercredi 1 décembre 2021


Wendy et Lucy
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

On peut faire du cinéma avec très peu de choses : une jeune femme, un chien, un parking de supermarché. Un film sur l’errance, mais qui restera immobile, stuck inside Oregon with the Fort Wayne Blues again, pendant 80 minutes.

Dans une de ces indistinctes villes américaines, horizontales et répétitives, où les seuls repères sont les Walgreens et les stations-services, une jeune femme (Michelle Williams) est en route pour un avenir meilleur : l’Alaska, qui promet enfin de l’emploi, enfin un endroit où dormir, enfin un endroit où se nourrir.

Mais sa voiture tombe en panne dans l’Oregon, dans une ville dont on ne saura jamais le nom. Si ce n’est qu’elle est à mi-chemin entre son départ de Fort Wayne (Indiana) et sa destination, Ketchikan (Alaska).

Kelly Reichardt aime cette immensité de l’Amérique, mais là, elle renonce justement à la filmer. En serrant le cadre autour de son actrice, l’enfermant dans ce non-lieu, les seules informations qui nous parviennent sont sonores et envahissantes. Sirène de train, voitures qui passent en coup de vent, vibration permanent de l’air conditionné. Wendy erre, mais dans un espace intérieur.

Elle n’a pour seul compagnon que sa chienne Lucy, et ne rencontrera que des personnages épisodiques : des hobos qui la conseillent sur l’Alaska, un vieux vigile de supermarché, un jeune vendeur discipliné, etc.

Mais elle va vite perdre Lucy et consacrer toute son énergie, et ses maigres dollars à la retrouver.

Cela semble peu. Le film est court mais peut paraître long. Tout y est lent. Mais c’est mal connaitre la méthode Reichardt, qui engendre systématiquement ce genre de réaction. Des films faibles, en réalité très forts. Car le slow-movie de Kelly Reichardt vous amène, imperceptiblement – mais lentement et sûrement – là où il doit, c’est-à-dire à l’émotion.


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