River of Grass est un peu l’équivalent, pour Kelly Reichardt, du Peur et Désir de Kubrick. C’est-à-dire un film de débutant, un peu raté, avec plein de maladresses, mais qui pose d’emblée les futures thématiques de la cinéaste de Old Joy, Wendy et Lucy, ou First Cow. La figure de style du road movie, de la fuite à deux ; mais aussi l’errance immobile, le poids du lieu qui détermine socialement les personnages, et la volonté de s’en extirper…
River of Grass, c’est aussi le premier et le dernier film de Reichardt en Floride, dans son Dade County natal. Un comté qui a particularité d’abriter une mégalopole urbaine (Miami) et un désert terrifiant (le marais des Everglades).
Il est symptomatique que notre couple maudit, Cozy et Lee, essaient pendant tout le film d’en sortir et n’y arrivent jamais. Kelly Reichardt, elle, s’enfuira au fin fond de l’Oregon, l’opposé absolu de la Floride : un état quasi désertique, pluvieux, progressiste, et qui inspirera ses plus beaux films.