Ce film, on va le voir pour Blanche Gardin et c’est toujours une erreur. Un film ne peut jamais être sauvé par son seul comédien, il faut une bonne histoire, un scénario. Et évidemment, on est déçu, car ce n’est pas une Blanchegardinerie, un pamphlet contre les dérives du temps, comme La Meilleure Version de Moi-Même. Ce n’est pas non plus la terrifiante Blanche de ses stand-ups, même si le début peut le laisser accroire, en Jeanne Mayer quadra lessivée, seule et couverte de dettes, sans parents ni compagnon.
Sa seule échappatoire financière : vendre l’appartement familial à Lisbonne. Sur le chemin elle rencontre Jean (Laurent Lafitte), ex-collégien de son enfance lisboète. Un peu lourd, un peu foufou, Jean lui colle aux basques. Sur place, Jeanne retrouve un ex, son frère, et bientôt le fantôme de sa mère (Marthe Keller) qui flotte sur ce vidage d’appartement. Sans oublier sa conscience, qui, tels les anges et les diables sur l’épaule de Tintin, joue les Jiminy Cricket*
Deuil, souvenirs d’enfance, coup d’un soir ou amour de toujours, le film dessine différentes pistes. Mais voilà, la petite musique gagne en profondeur, la conscience de Jeanne se fait plus discrète et on se surprend à monter dans ce petit train. Il est rare en effet de voir un film qui s’améliore de minute en minute. Le film est longuet au début, et semble de plus en plus court, de plus en plus musclé. Laffitte déroule une des extraordinaires performances, à mi-chemin entre la loufoquerie et la folie, mais tout en retenue. Tout le Monde Aime Jeanne devient alors plus profond, plus subtil, plus léger, jusqu’à son superbe dénouement.
On était allé voir Blanche, on a découvert Céline…
* C’est d’ailleurs la partie la moins réussie du film : Celine Devaux vient de l’animation et a voulu absolument écrire, dessiner, et interpréter elle-même cette conscience. Ce n’est pas toujours ni bien écrit ni bien joué.