lundi 15 mars 2010


Brothers
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Et voilà, le boulot s’accumule et on oublie de parler de Brothers, sûrement le film le plus intéressant du trimestre, hormis l’ébouriffant Shutter Island, plus rigolo mais sûrement moins profond.

Brothers, c’est un garage à Ferrari : les meilleurs acteurs de la génération trentenaires, plus Sam Shepard en beauf vétéran du Vietnam. Aux commandes, Jim Sheridan, monsieur Au Nom du Père. Et en plus un sujet qui décoiffe.

De quoi s’agit-il ? De la parabole du Bon et du Mauvais Fils, tout simplement. Sam, le bon fils (Tobey Maguire) est parfait : capitaine respecté des Marines, marié à Grâce, la plus belle fille de la ville (Natalie Portman), et père de deux mignonnes petites filles. En face, son noir opposé Tommy, le frérot qui a mal tourné (Jake Gyllenhaal) : alcool, drogue, braquage et taule. On pense évidemment à l’Indian Runner de Sean Penn, et à la chanson de Springsteen,Highway Patrolman*

Quand le film débute, le gentil frère va chercher le mouton noir à sa sortie de prison. S’ensuit un dîner familial à couper au couteau, où le père démontre un parti-pris terrifiant pour Sam.

Là-dessus, notre bon soldat part en Afghanistan… Et meurt. S’ensuit probablement la meilleure part de Brothers : l’impossible deuil de Grace*, le remord insurmontable de Tommy, qui donnerait volontiers sa vie ratée pour celle de son frère, et du père qui – aveu terrible – serait prêt à l’accepter. Mais voilà, la vie reprend ses droits, il faut élever les enfants et réapprendre à vivre, et à aimer. Ce qui doit arriver arrive : un peu éméchés, Grace et Sam se rapprochent.

C’est le moment où réapparaît Sam, pas mort, mais prisonnier échappé des talibans, et chargé d’un lourd secret.

C’est la que le film commence, car le bon fils est revenu transformé en monstre, un monstre comme seule la guerre peut en produire.

On ne racontera pas la suite, mais c’est ce propos-là qui rend Brothers passionnant : nous ne sommes pas, en effet, le produit de la génétique (et d’un quelconque gène criminel), ni des traumatismes parentaux… Au contraire, selon les circonstances, (et sous l’influence de notre passé, certes), mais surtout selon nos actes, chacun peut devenir un monstre, ou s’amender.

Une fois qu’il a trouvé un rôle possible, Tommy peut faire le bien, car il le souhaite. Et son frère Sam, le militaire (trop) parfait, peut suivre, de manière incompréhensible un code de l’honneur que l’Armée elle-même ne lui a pas demandé, ce qui l’amènera à la folie…

Le talent de Jim Sheridan, c’est de poser ses gros clichés, puis de nous prendre systématiquement à contre pied, et justement de nous amener à réfléchir sur nos propres préjuges…

On oubliera seulement la dernière minute de Brothers, qui ne gâche pas le film, mais le conclut par trop brutalement, en oubliant de résoudre quelques éléments au passage. Les 103 premières minutes les compensent aisément…

*Brothers est en fait le remake de Brodre, un film danois de Susanne Bier


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